Des avocats du gouvernement fédéral ont été accusés d'avoir tenté d'intimider des témoins afin de les empêcher de coopérer à une enquête de la Commission d'examen des plaintes de la police militaire.

Lori Bokenfohr, l'avocate d'un diplomate canadien qui a fait part de son intention de témoigner devant la Commission, a violemment critiqué le ministère de la Justice dans une lettre obtenue par La Presse Canadienne mardi, soit un jour avant la reprise des audiences publiques, maintes fois reportées.

Me Bokenfohr, qui a refusé d'être interviewée mardi, a notamment soutenu que le procureur principal du gouvernement dans ce dossier, Alain Préfontaine, avait induit la Commission en erreur en affirmant la semaine dernière que les témoins qui refusaient d'être interrogés exerçaient simplement leurs droits individuels.

Me Préfontaine a démenti les accusations de l'avocate.

Mais Lori Bokenfohr a donné en référence une lettre envoyée par Alain Préfontaine le 28 juillet 2009 à tous les témoins cités à comparaître devant la Commission, dont son client Richard Colvin.

Les témoins, parmi lesquels on retrouve des officiers militaires, des officiers de la police militaire, des fonctionnaires des services correctionnels et du personnel des Affaires étrangères, ont été avisés que des réputations étaient en jeu. La lettre poursuit en identifiant ce qui «est en jeu» pour eux.

Selon Me Bokenfohr, Me Préfontaine a laissé entendre que le but de l'entrevue préparatoire à l'audience était de prendre les témoins en défaut une fois qu'ils seraient devant la Commission.

Dans une brève entrevue, Alain Préfontaine a accusé l'avocate de Richard Colvin d'avoir manqué au secret professionnel en divulguant le contenu de la lettre qu'il avait écrite.

Il a déclaré qu'il ne pouvait pas parler directement de la missive du 28 juillet, mais que les témoins étaient des personnes intelligentes et articulées, et que de dire qu'elles pouvaient être intimidées revenait à exagérer la situation.

En dépit des avertissements, M. Colvin a décidé au début de septembre de collaborer avec la Commission.

Les avocats du gouvernement ont alors invoqué la sécurité nationale concernant tout ce qu'il pourrait dire ou toute déclaration écrite qu'il pourrait présenter dans le cadre de l'enquête indépendante.

Ils ont également essayé de le rayer de la liste des témoins en soutenant que son témoignage n'avait aucun rapport avec l'investigation de la Commission.

Le premier ministre Stephen Harper et le ministre de la Défense, Peter MacKay, ont nié à plusieurs reprises les allégations de l'opposition voulant que le gouvernement essaie de faire obstruction à l'enquête de la Commission, qui cherche à déterminer si oui ou non la police militaire canadienne a remis des prisonniers aux autorités afghanes en sachant qu'ils courraient le risque d'être torturés.

Si la police militaire se révèle coupable, il pourrait s'agir d'une infraction à la loi internationale.