Les députés fédéraux reprennent lundi le chemin du Parlement après près de trois mois d'absence, mais ils pourraient aussitôt devoir plier bagage et rentrer dans leur comté afin de tenter de charmer leurs électeurs.

Car les travaux parlementaires seront vraisemblablement de courte durée cet automne. Les rumeurs d'élections se sont intensifiées tout au cours de l'été, pour atteindre un point culminant il y a deux semaines, lorsque Michael Ignatieff a annoncé que les libéraux n'appuieraient plus le gouvernement minoritaire conservateur et tenteraient de le défaire à la première occasion. La diffusion mercredi d'une vidéo où l'on voyait le premier ministre Stephen Harper, ne mâchant pas ses mots, exhorter ses partisans à faire en sorte qu'il obtienne un mandat majoritaire au prochain scrutin au risque d'une coalition libérale avec les «séparatistes et les socialistes», semble fermer la porte à toute collaboration éventuelle entre lui et les autres partis d'opposition.

«Disons juste que ça part bien mal!», lançait le chef-adjoint du Nouveau Parti démocratique, Thomas Mulcair, au lendemain de la diffusion de cette vidéo prise à l'insu du leader du Parti conservateur.

Il y a tout juste un an, Stephen Harper prenait de court les partis d'opposition en demandant la dissolution du Parlement avant même la rentrée, prétextant qu'il était rendu désormais impossible de travailler avec ses adversaires politiques.

Cette fois, ce sont les libéraux de Michael Ignatieff qui se plaignent du manque d'écoute du gouvernement et veulent forcer les Canadiens à aller aux urnes.

«La différence entre M. Harper et moi-même, c'est que je ne traite pas les adversaires politiques comme des ennemis. Il a déjà perdu la confiance du Parlement à une reprise en agissant de cette façon, il risque que ça se produise de nouveau», lançait M. Ignatieff vendredi lors d'un bref point de presse.

«Nous savons comment faire fonctionner le Parlement. Je suis favorable aux compromis, à tendre la main, à la consultation», ajoutait-il en comparaison.

Les conservateurs, eux, affirment que des élections retarderaient automatiquement leur plan de relance économique.

«Dans les régions que j'ai visité, personne ne veut d'élections. J'espère qu'on va être là et qu'on va continuer à faire ce qu'on a à faire (...). Il y a tellement de dossiers présentement en évolution», a fait valoir le ministre du Développement économique pour le Québec, Denis Lebel.

Bien qu'ils n'en veuillent pas, les conservateurs se préparent malgré tout pour une campagne électorale. L'une de leur stratégie est de persuader l'électorat que s'il était minoritaire, M. Ignatieff opterait pour un gouvernement de coalition avec le NPD et le Bloc québécois pour diriger le pays, ce qu'a pourtant fermement réfuté le chef libéral.

À ce sujet, l'ancien conseiller de M. Harper, Tom Flanagan, a cependant confié au quotidien Globe and Mail, mercredi, que «ça n'a pas besoin d'être vrai. Ca doit juste être plausible». De façon générale, les conservateurs rappellent qu'après tout, M. Ignatieff était d'accord avec son prédécesseur, Stéphane Dion, lorsque ce dernier a signé un accord de coalition avec le NPD en décembre dernier.

Quelques dossiers

Les quelques jours que dureront possiblement la session parlementaire avant le déclenchement de la campagne électorale pourraient néanmoins être suffisants pour faire avancer quelques dossiers.

La ministre des Ressources humaines, Diane Finley, devrait présenter dès cette semaine de nouvelles mesures pour venir en aide aux chômeurs de longue date.

Le Bloc québécois devrait quant à lui déposer un projet de loi pour abolir la possibilité pour les criminels d'être libérés au sixième de leur peine d'emprisonnement.

En outre, la reprise économique et le déficit devraient nécessairement prendre une place importante dans les débats. Jeudi, le ministre des Finances, Jim Flaherty, a annoncé que le déficit s'élèvera à pas moins de 56 milliards $ pour l'exercice financier de 2009-2010.