Le chef libéral, Michael Ignatieff, promet de payer le déficit laissé par le gouvernement Harper sans augmenter les impôts.

À peine une journée après avoir annoncé qu'il tenterait de défaire le gouvernement au Parlement à la première occasion, M. Ignatieff a ainsi pris ses distances d'une position controversée qu'il avait adoptée plus tôt cette année.En avril, le chef libéral avait évoqué la possibilité de devoir augmenter les impôts pour rembourser le déficit de quelque 50 milliards de dollars prévu par le gouvernement. Ses adversaires politiques, en particulier les conservateurs, avaient sauté sur l'occasion pour l'attaquer dans les médias.

Or, en point de presse à Sudbury au terme d'une réunion du caucus de son parti, Michael Ignatieff a tenu à mettre les pendules à l'heure - et à clarifier d'emblée une question susceptible de revenir le hanter dans une campagne électorale.

«Nous avons déjà été dans la même position, a-t-il dit. Nous avons hérité d'un déficit de 42 milliards de dollars de M. Mulroney et nous avons dû le nettoyer, et nous l'avons fait sans augmenter les impôts. Nous avons hérité d'un trou de 50 milliards de dollars de M. Harper et nous allons le nettoyer sans augmenter les impôts.» Le chef libéral n'a cependant pas précisé comment il comptait rembourser ce grand déficit, résultat de la crise économique et du besoin d'augmenter les dépenses gouvernementales pour stimuler l'économie.

«Attendez pour voir», a-t-il seulement lancé.

Les conservateurs ont réagi en fin de journée en affirmant que la dernière fois que les libéraux ont voulu rembourser la dette, dans les années 90, ils l'ont fait en réduisant les transferts aux provinces en matière de santé et d'éducation.

Pas de déclic soudain

M. Ignatieff a partagé pour la première fois hier midi ses réflexions après avoir causé une commotion, mardi, en annonçant qu'il n'appuierait plus le gouvernement Harper et tenterait de le défaire à la première occasion.

«Il n'y a pas eu de déclic soudain», a-t-il expliqué en parlant du moment où il a pris sa décision, qu'il a décrite comme étant irréversible. Il dit avoir consulté plusieurs de ses collègues durant l'été et réfléchi longtemps et calmement, en plus de parler aux Canadiens durant sa tournée estivale.

Cette décision l'a néanmoins forcé à annuler le voyage qu'il prévoyait faire en Chine avec une délégation de députés entre le 6 et le 9 septembre. «Nous voulons voir comment la situation politique se développe. M. Harper a des cartes à jouer, M. Duceppe a des cartes à jouer, M. Layton a des cartes à jouer et il me paraît responsable d'être ici pendant que ces questions se clarifient», a-t-il dit.

Le NPD a évoqué mardi la possibilité de collaborer avec le gouvernement pour empêcher des élections. «Ça leur appartient de décider. Je ne peux pas décider pour les autres partis», a réagi Michael Ignatieff, peu bavard sur le sujet.

Outre la question du déficit, M. Ignatieff a donné un autre aperçu de sa plateforme électorale, cette fois-ci sur la question de l'environnement. Prenant clairement ses distances face aux politiques de son prédécesseur, il a précisé sa préférence pour un système de quotas et d'échanges (cap and trade) pour réduire les émissions de gaz à effet de serre. «Le geste qui doit être fait est d'établir un système continental de quotas et d'échanges», a-t-il insisté.

Il a aussi prêché en faveur d'un plan d'action pour nettoyer les plans d'eau canadiens le plus rapidement possible. «Vous verrez un plan environnemental très robuste dans notre plateforme quand les élections viendront», a-t-il promis.

«Unis» derrière le chef

La décision de Michael Ignatieff de provoquer des élections n'a pas plu à tous les membres de son parti. Certains députés et sénateurs, particulièrement en Ontario, lui avaient clairement fait savoir qu'ils auraient préféré attendre encore un peu. Néanmoins, les libéraux ont tenté de projeter une image d'unité et d'harmonie, hier, au terme de ce caucus mouvementé.

Le sénateur David Smith est l'un d'eux. L'organisateur avait déclaré qu'il serait irresponsable de tenter de déclencher des élections de manière continuelle, s'est dit serein de la décision du chef. «Je pense que la décision est de première classe!» s'est-il exclamé.