Même si les audiences de la commission Oliphant, chargée de faire la lumière sur ses relations avec l'ancien premier ministre Brian Mulroney, se sont terminées hier et qu'il a perdu son plus récent recours judiciaire, Karlheinz Schreiber ne craint pas d'être extradé hors du Canada.

«Cette possibilité n'existe pas. Nous avons d'autres procédures en cours, auprès du ministre (de la Justice, Rob Nicholson), et auprès des tribunaux. Nous avons de nouveaux arguments. Nous attendons les instructions», a dit M. Schreiber, en marge de la dernière journée d'audiences de la commission d'enquête présidée par le juge Jeffrey Oliphant.

M. Schreiber se bat depuis bientôt 10 ans pour éviter son extradition vers l'Allemagne, où il devrait répondre à des accusations de fraude, de corruption et d'évasion fiscale.

Il avait obtenu un sursis le temps que se terminent les travaux de la commission qui étudie ses relations d'affaires avec Brian Mulroney, qui a déjà admis avoir accepté 225 000$ en argent comptant de l'homme d'affaires germano-canadien. Avec la fin des travaux, le sort de M. Schreiber demeure donc incertain. Le 10 juillet dernier, le Cour d'appel de l'Ontario a par ailleurs rejeté une nouvelle requête qu'il avait initiée pour éviter l'extradition.

Mais peu importe. Pas question, pour l'homme de 75 ans, d'avoir une valise prête sur le pas de la porte. «C'est une question de savoir si le Canada est encore une démocratie ou non», a-t-il répondu, laconique, refusant de donner plus d'explications.

Conclusion

Après 26 jours d'audience échelonnés sur sept mois, la comparution de 29 témoins, et le dépôt de 68 mémoires, la commission a conclu ses travaux hier, avec les témoignages de Sue Gray, spécialiste en éthique du gouvernement de Gordon Brown, au Royaume-Uni, et de Mary Dawson, la commissaire aux conflits d'intérêts et à l'éthique du Canada.

Cette étape concluait la deuxième partie de la commission, appelée «examen des politiques», et qui vise à formuler des recommandations pour établir de nouvelles règles ou lignes directrices en matière d'éthique pour les politiciens qui se trouvent un travail dans le secteur privé après la fin de leur mandat.

En avril et mai derniers, l'homme d'affaires et l'ancien premier ministre du Canada de 1984 à 1993 sont tous les deux venus témoigner pendant plusieurs jours pour expliquer leur version des faits. S'il est clair qu'il y a eu échange d'argent, les deux hommes ne s'entendent toutefois pas sur la somme et sur le mandat qui avait alors été donné à M. Mulroney. Ce dernier estime qu'il devait faire un travail de lobbying international, après son retrait de la vie politique, en échange des 225 000$. L'homme d'affaires prétend plutôt avoir remis 300 000$ à l'ancien premier ministre pour qu'il convainque le gouvernement en place d'aller de l'avant avec le projet Bear Head, visant la construction d'une usine de véhicules blindés, en sol canadien, pour la société allemande Thyssen.

Depuis 2007, la Loi sur les conflits d'intérêts a remplacé l'ancien code de conduite et impose certaines règles pour «l'après-mandat» des ministres d'un gouvernement.

Le juge Oliphant, qui a le mandat à la fois de faire la lumière sur les faits, mais aussi de formuler des recommandations liées à l'éthique, se retire donc à partir de maintenant pour préparer son rapport, qui est attendu avant le 31 décembre de cette année. Selon toute vraisemblance, les conclusions de l'enquête pourraient être déposées au début du mois de décembre.