Le premier ministre Stephen Harper et le chef du Parti libéral Michael Ignatieff ont eu deux rencontres d'une heure hier afin d'aplanir leurs différends et d'éviter des élections estivales.

Les pourparlers entre les deux hommes à quelques jours d'un vote crucial mettant en jeu la survie du gouvernement minoritaire conservateur se sont déroulés dans le plus grand secret.

MM. Harper et Ignatieff ont convenu de continuer le dialogue ce matin.

Une première rencontre a eu lieu au bureau du premier ministre situé dans l'immeuble Langevin, en face du parlement, durant la période de questions, en milieu d'après-midi.

La seconde s'est déroulée en soirée à la résidence officielle du premier ministre, située au 24, promenade Sussex, à Ottawa.

Les proches collaborateurs du premier ministre et du chef libéral se sont bornés à dire que les deux tête-à-tête avaient été «productifs».

«Le premier ministre et le chef de l'opposition Michael Ignatieff ont eu une deuxième rencontre ce soir (hier soir). Ils convenus de se parler à nouveau demain matin (ce matin)», s'est contenté de dire Dimitri Soudas, porte-parole de M. Harper, vers 20h hier.

Stephen Harper avait offert de rencontrer le chef libéral lundi, après que Michael Ignatieff eut évoqué la possibilité de voter contre le gouvernement conservateur à la Chambre des communes lors du vote sur les crédits budgétaires de vendredi si le premier ministre ne se pliait pas à quatre conditions.

Le chef libéral avait pressé M. Harper de dévoiler avant les vacances estivales la réforme qu'il envisage d'apporter au programme d'assurance emploi, de détailler les dépenses réalisées dans les projets d'infrastructures, de préciser son plan pour pallier la pénurie d'isotopes médicaux et d'indiquer comment le gouvernement compte rétablir l'équilibre budgétaire.

Le sort du gouvernement Harper repose entre les mains des 77 députés libéraux aux Communes, puisque le Bloc québécois et le NPD ont affirmé avoir la ferme intention de voter contre les crédits budgétaires. Il s'agit d'un vote de confiance. Une défaite du gouvernement provoquerait un scrutin fédéral le 27 juillet.

Le principal point en litige concerne les améliorations à apporter à l'assurance emploi.

Michael Ignatieff demande depuis plusieurs mois d'uniformiser les critères d'admissibilité au programme avant l'ajournement des travaux parlementaires de vendredi. Le chef libéral souhaite que toute personne ayant accumulé 360 heures de travail puisse obtenir des prestations. À l'heure actuelle, les heures requises varient d'une région à l'autre, selon la vigueur de l'économie.

Les conservateurs ont toujours opposé une fin de non-recevoir à cette proposition, la jugeant trop coûteuse et susceptible d'engendrer des abus. M. Harper a indiqué lundi que la seule réforme qu'il a en tête pour le moment est de permettre aux travailleurs autonomes de cotiser au régime d'assurance emploi pour être admissibles à des prestations en cas de perte d'emploi. Il a précisé que ces changements seraient adoptés au plus tôt à l'automne.

Au sujet du déficit, le ministre des Finances, Jim Flaherty, a indiqué devant la commission parlementaire, hier matin, qu'il prévoyait toujours un retour à l'équilibre budgétaire en 2013.

Au moment de mettre sous presse, hier soir, des sources ont indiqué que les pourparlers allaient suffisamment bon train pour espérer éviter une collision frontale entre les deux partis. MM. Harper et Ignatieff devraient présenter le fruit de leurs négociations à leur caucus respectif ce matin.

Projets en péril?

Par ailleurs, durant une période de questions particulièrement survoltée, hier, le président du Conseil du Trésor, Vic Toews, loin de calmer le jeu, a affirmé que les libéraux de Michael Ignatieff mettraient la reprise économique en péril s'ils renversaient le gouvernement minoritaire conservateur.

M. Toews a soutenu que la chute des conservateurs aurait pour effet de paralyser la machine gouvernementale et de retarder le financement de nombreux projets d'infrastructures en pleine saison de la construction. Il a notamment fait valoir que les négociations entre Ottawa et les villes ou les provinces tomberaient au point mort.

«Des milliers de jobs seront en danger si l'opposition libérale vote contre le gouvernement», a affirmé M. Toews.

Le député libéral Denis Coderre l'a accusé de mentir. «Lorsqu'on a voté pour les budgets, on est en mesure de négocier. L'argent, on l'a accepté. Alors, tout ce qu'il dit, c'est faux! Qu'on le dise en anglais ou en français, ce qu'il a dit est faux!» a-t-il tonné, les yeux rivés sur la caméra de la Chambre des communes.

Plus tôt dans la journée, le Parti libéral avait aussi accusé le premier ministre Stephen Harper d'induire les Canadiens en erreur en prétendant qu'un vote contre les crédits budgétaires empêcherait l'approbation parlementaire de milliards de dollars nécessaires au plan de relance économique du gouvernement.

«La Presse Canadienne a confirmé auprès de responsables du Conseil du Trésor, le 15 juin 2009, que le Parlement avait bel et bien déjà approuvé la dépense de 21,1 milliards de dollars sur les 22,7 milliards prévus pour relancer l'économie. Rien n'empêche ces fonds d'être dépensés pendant une campagne électorale», dit le communiqué de presse.