Une majorité de députés fédéraux s'est prononcée mercredi contre un projet de loi du Bloc québécois, qui proposait l'application de la loi 101 aux entreprises fédérales du Québec régies par le Code canadien du travail.

Comme l'avaient laissé pressentir mardi le chef libéral, Michael Ignatieff, et son lieutenant québécois, Denis Coderre, les députés libéraux présents lors du vote se sont prononcés à l'unanimité contre le projet de loi C-307, déposé aux Communes en février dernier par le leader parlementaire du Bloc, Pierre Paquette.

Les conservateurs, qui s'étaient déjà opposés à la proposition des bloquistes lorsque ceux-ci ont présenté un premier projet de loi similaire en 2007, ont réitéré leur position mercredi après-midi.

Comme il s'agissait d'un projet de loi privé, les députés n'étaient pas tenus de respecter la ligne de parti. Mais les votes cumulés des libéraux et des conservateurs, qui sont tous demeurés fidèles à la prise de position de leurs chefs, ont bloqué le projet de loi des bloquistes.

Les élus du Nouveau Parti démocratique ont de leur côté, comme la première fois, appuyé l'initiative du Bloc.

Le chef bloquiste, Gilles Duceppe, a déploré l'issue du vote et reproché aux conservateurs et libéraux, dont les deux chefs étaient par ailleurs absents en Chambre, de dire une chose et de faire son contraire.

«Ca démontre que les conservateurs et les libéraux, quand ils reconnaissent la nation québécoise, ce n'est que symbolique. Mais dès que l'on propose des choses concrètes à cette reconnaissance, comme la langue - on ne peut pas reconnaître une nation sans reconnaître sa langue - ils sont contre», a-t-il scandé à sa sortie des Communes.

Les libéraux se contredisent également, selon M. Duceppe, puisqu'ils affirment appuyer la loi 101, mais s'opposent à son application dans les institutions fédérales.

Le porte-parole du Parti libéral en matière de Langues officielles, Pablo Rodriguez, a cependant rétorqué qu'une telle application de la loi serait tout d'abord anticonstitutionnelle, puisqu'une loi provinciale - comme la loi 101 - ne peut pas avoir préséance sur la loi fédérale qui ordonne le respect des deux langues officielles.

«Ce projet de loi-là, en plus de brimer les droits de la minorité anglophone (du Québec), vient ouvrir la porte et permettre aux autres provinces de dire qu'elles aussi ne veulent plus offrir de services en français. (...) Et à cause de cela, on risque de ne pas avoir plus de français, au contraire, on risque d'avoir moins de français à travers le Canada. Et c'est pour cela qu'on s'y oppose», a-t-il justifié.

Mais le chef bloquiste a rejeté cette explication.

«La loi 101 n'empêche d'aucune façon qu'il y ait des services en anglais. Mais elle dit que la langue officielle, la langue de travail, doit être le français. Dans les hôpitaux et les CLSC il y a aussi des services en anglais, mais la langue de service est le français», a-t-il détaillé.

Puisque des banques, des aéroports ou même Poste Canada ne sont pas assujettis à la loi 101, leurs employés peuvent, par exemple, se faire imposer des réunions en anglais. Cette situation toucherait entre 200 000 et 250 000 travailleurs de la province, selon le Bloc.