Le moteur de la machine du Parti libéral tourne plus rondement depuis que Michael Ignatieff en a pris les commandes en décembre. En plus de devancer les conservateurs dans les sondages depuis quelques semaines, le Parti libéral est sur le point de rembourser toute sa dette de 2 millions de dollars six mois après les dernières élections.

Selon le nouveau directeur national du PLC, Rocco Rossi, la dette du parti sera entièrement remboursée au plus tard à la mi-mai, libérant ainsi les troupes libérales d'un important boulet au moment même où certains stratèges envisagent de provoquer la tenue d'élections à l'automne.

Dans une entrevue accordée à La Presse, M. Rossi a confirmé que les dons sont plus fréquents et plus nombreux depuis le début de l'année et l'arrivée de Michael Ignatieff à la tête du PLC explique en bonne partie ce revirement de fortune.

L'an dernier, le Parti libéral alors dirigé par Stéphane Dion n'avait récolté que 5,9 millions de dollars, une bien maigre récolte comparativement aux 21,9 millions recueillis par le Parti conservateur. Mais en décembre, après que Michael Ignatieff eut été acclamé chef, les dons des libéraux de plus de 200 $ (832 000$) avaient dépassé ceux des conservateurs (826 000$).

«Je pense que notre situation financière s'améliore de jour en jour. Nous avons vu l'effet Ignatieff durant les deux dernières semaines de décembre et cela s'est poursuivi durant le premier trimestre de 2009. Nos résultats sont nettement meilleurs que le premier trimestre de 2008 (seulement 846 000$). Ce n'est une raison pour danser dans la rue, mais nous sommes dans la bonne direction», a affirmé M. Rossi.

Au cours des dernières semaines, M. Ignatieff a aussi parcouru le pays afin participer à des soirées de collecte de fonds. À Vancouver, 700 personnes sont venues l'entendre, 850 militants en ont fait autant à Edmonton et 1100 personnes à Toronto il y a deux semaines. Durant cette seule soirée dans la Ville reine, les coffres du parti se sont enrichis de près d'un million de dollars. «Nous n'avions pas réussi à faire ce tour de force depuis plusieurs années», se félicite M. Rossi.

Inspirés par Obama

Cette nouvelle va sans doute réjouir les quelque 4000 militants attendus au congrès national du Parti libéral qui aura lieu à Vancouver du 30 avril au 2 mai. Durant ce congrès, M. Ignatieff sera officiellement confirmé par les militants comme chef du parti.

M. Ignatieff a confié l'important poste de directeur national à M. Rossi au début de l'année. Auparavant, M. Rossi, qui parle trois langues - anglais, français et italien - avait fait sa marque en tant que PDG de la Fondation du coeur de l'Ontario. Sous sa houlette, cet organisme de charité a vu son financement bondir de 30% pour atteindre les 120 millions de dollars.

En entrevue, M. Rossi a fait valoir qu'il était crucial que le Parti libéral règle ses problèmes de financement pour le bien de la démocratie canadienne. Il a soutenu que le Parti conservateur, qui a su bien maîtriser l'art du financement populaire après que les dons des entreprises et des syndicats eurent d'abord été limités en 2004 avant d'être interdits en 2006, avait les moyens pour faire des campagnes à grand frais alors que le Parti libéral ne pouvait tout simplement pas rivaliser.

«Nous avions un très grand défi devant nous, mais les choses commencent à bouger et à bouger très, très bien. Si bien que j'ai confiance qu'avant la fin de mai, nous serons de retour dans le noir», a-t-il dit.

M. Rossi a décidé de s'inspirer des stratégies de financement utilisées par Barack Obama durant la dernière campagne présidentielle. À la fin de cette campagne historique, le camp d'Obama avait à sa disposition 13 millions d'adresses de courriels, cinq millions de bénévoles et quatre millions de donateurs qui ont réussi à amasser la rondelette somme de 600 millions de dollars (moyenne de 150 $ par donateur).

Le Parti libéral s'est donc fixé comme objectif de construire une banque de données proportionnelle à la population canadienne, soit 10% de ce que le camp d'Obama a accompli. «Cela veut donc dire qu'on doit avoir accès à 1,3 million d'adresses de courriel, 500 000 membres du parti et 400 000 donateurs. Mais nous allons d'abord tenter de réaliser la moitié de cela, soit 250 000 membres et 200 000 donateurs. Je crois que c'est plus réaliste et si nous y arrivons et obtenons 100 $ par année par donateur, cela nous assurer 20 millions de dollars par année, soit la somme que récolte à peu près le Parti conservateur», a expliqué M. Rossi.

«Nous ne sommes pas Barack Obama. Il est un phénomène à part. Mais nous pouvons apprendre beaucoup de leçons de lui et nous pouvons utiliser les outils de l'internet à notre avantage», a-t-il ajouté.