Tout indique que la troisième tentative du gouvernement Harper d'abolir le registre des armes à feu mourra encore une fois au feuilleton. Mercredi soir à Toronto, le chef libéral Michael Ignatieff a dit à une foule de plus de 1000 supporters qu'il ne laisserait pas passer le projet de loi présenté au Sénat par la sénatrice conservatrice Marjory LeBreton. Et hier, la députée libérale Marlene Jennings a indiqué que son parti est à ce point opposé au projet de loi - qui vise les fusils de chasse et les carabines - qu'il ne compte même pas l'étudier en comité sénatorial. «Envoyer un projet de loi en comité veut dire que vous êtes en faveur avec le principe du projet de loi. Le principe (...), c'est d'abolir le registre des armes à feu, et nous sommes contre cela «, a-t-elle tranché.

Cette initiative de l'opposition officielle devrait plaire à l'un des survivants de la fusillade du collège Dawson, Hayder Kadhim, qui a écrit une lettre ouverte, hier, pour demander aux partis de l'opposition d'empêcher le gouvernement Harper d'aller de l'avant avec son projet. Hayder Kadhim dénonce le discours voulant que ce ne soient pas les armes à feu qui tuent des gens mais bien des gens qui tuent d'autres personnes. Il rétorque qu'un tueur sans arme à feu a une bien moindre chance de tuer autant de personnes qu'une personne armée. Hayder Kadhim a été atteint de trois projectiles lorsque Kimveer Gill a fait irruption et ouvert le feu, le 13 septembre 2006, au collège Dawson. Une jeune femme, Anastasia De Sousa, a été tuée et 19 autres étudiants ont été blessés, dont huit gravement, avant que Gill ne retourne une de ses trois armes à feu contre lui-même.

 

Hayder Kadhim souligne qu'il doit toujours vivre avec une balle dans le cou et les fragments d'une autre balle dans la tête, que les médecins n'ont pu lui enlever. Bien qu'il souffre toujours psychologiquement et physiquement de la fusillade, il ajoute qu'il est encore plus blessé par la position des conservateurs qui affaiblira le contrôle des armes à feu. Faisant le lien avec la crise économique, il s'interroge sur le bien-fondé d'affaiblir les lois sur les armes à feu alors que plusieurs personnes perdent leur emploi. «Je demande à M. Harper et à ses conservateurs d'imaginer un moment que quelqu'un près d'eux était une victime de violence d'armes à feu. Se sentiraient-ils de la même façon envers leur vision du contrôle des armes à feu?» «M. Kadhim n'a pas à s'inquiéter», a déclaré Mme Jennings. Le Parti libéral détient la majorité des sièges au Sénat. Le député bloquiste Serge Ménard, de son côté, a demandé au gouvernement de «mettre fin à son obsession d'abolir le registre, ou sinon, transférer les pouvoirs au Québec pour qu'il administre et gère lui-même le registre des armes à feu». Le ministre de la Sécurité publique, Peter Van Loan, a répondu que la province était libre de créer son propre registre en vertu de son pouvoir de légiférer sur des questions de propriété.