Le gouvernement Harper croit que certaines des conditions contenues dans le plan de relance de 819 milliards US du nouveau président des États-Unis, Barack Obama, risquent de provoquer une montée du protectionnisme dans le monde.

Selon le premier ministre Stephen Harper, l'érection de barrières à la libre circulation des biens et services est une véritable menace pour l'économie de la planète et pourrait compromettre la reprise économique, voire aggraver la crise actuelle.

 

Le plan de relance de la nouvelle administration américaine stipule notamment que le fer et l'acier doivent être entièrement achetés aux États-Unis, sauf si l'offre d'acier américain ne suffit pas à la demande ou encore si le prix de cette ressource fait grimper la facture finale du projet de plus de 25%.

Or, le Canada exporte près de 40% de son acier aux États-Unis, tous les deux signataires de l'Accord de libre-échange nord-américain avec le Mexique.

Le plan du président Obama a été adopté par la Chambre des représentants mercredi. Il doit maintenant être approuvé par le Sénat avant de voir officiellement le jour.

Le premier ministre a dit avoir bon espoir que le plan sera modifié avant d'être adopté par le Sénat de sorte que les États-Unis respectent leurs obligations internationales en matière de commerce.

«C'est évidemment une question très importante et nous sommes très préoccupés. J'ai abordé ce dossier avec notre ambassadeur aux États-Unis hier (mercredi) et je sais que les pays dans le monde expriment aussi leurs inquiétudes au sujet de certaines des mesures. Elles vont à l'encontre des obligations des États-Unis, mais aussi à l'encontre des discussions que nous avons eues au G20 (à Washington). (...) Nous nous attendons à ce que les États-Unis respectent leurs obligations internationales», a affirmé M. Harper.

M. Harper a tenu ces propos hier à la Chambre des communes en réponse à une question du chef libéral Michael Ignatieff.

M. Ignatieff a exhorté le premier ministre à soulever cet épineux dossier à l'occasion de la visite du président Obama au Canada le 19 février. «Si les États-Unis érigent des barrières contre le Canada, cela ralentira la reprise économique dans nos deux pays», a dit le chef libéral.

Le NPD a offert la seule note discordante hier aux Communes sur cette question en demandant au gouvernement Harper d'adopter des mesures comparables à celles des États-Unis afin de protéger les emplois au pays.

Le chef néo-démocrate Jack Layton a soutenu que tout plan de relance de l'économie canadienne doit favoriser l'achat de produits fabriqués au Canada.

«Tous les pays sont en train de faire cela. Nous pensons que le Canada doit s'engager dans la même voie», a dit M. Layton. Interrogé pour savoir si cela ne représentait pas une forme de protectionnisme, le chef du NPD a répondu: «C'est normal d'assurer qu'il y aura un certain pourcentage d'emplois dans un pays quand on dépense de l'argent des contribuables.»

Mais le ministre du Commerce international, Stockwell Day, a soutenu que ce sont des mesures protectionnistes comme celles qu'envisagent les États-Unis qui ont mené à la Grande Dépression des années 1930 ainsi qu'à des guerres commerciales. Il a affirmé avoir l'intention d'aborder cette question avec ses homologues américains en fin de semaine au Sommet de Davos afin de leur rappeler que le protectionnisme viole l'esprit et la lettre de l'ALENA et les règles de l'Organisation mondiale du commerce.

«L'histoire nous montre clairement qu'on ne peut pas verser dans le protectionnisme. C'est ce qui s'est produit dans les années 30 et ce qui aurait pu être une récession d'un an ou deux s'est transformée en Grande Dépression. Nous voulons éviter cela», a dit le ministre Day.

Le critique libéral aux affaires étrangères, Bob Rae, s'est dit estomaqué de voir que le NPD réclame des mesures comparables au Canada. Il a soutenu que les autorités canadiennes doivent mettre les bouchées doubles pour convaincre la nouvelle administration américaine de faire marche arrière avant qu'il ne soit trop tard.

«Nous devons faire tout notre possible pour convaincre les Américains que c'n'est pas dans leur propre intérêt de commencer une telle guerre protectionniste non seulement envers le Canada, mais envers tous les pays qui sont des partenaires importants des États-Unis. C'est important de joindre les Européens, et les autres pour dire clairement que ça ne va pas marcher et que c'est illégal», a dit M. Rae.