À peine arrivé à la tête du Parti libéral du Canada, Michael Ignatieff fait face à l'une des plus importantes décisions de sa carrière, le sort du gouvernement conservateur minoritaire étant désormais entre ses mains.

Le Bloc québécois et le Nouveau Parti démocratique ont fait savoir qu'ils voteront contre le budget déposé mardi par le ministre des Finances, Jim Flaherty.

M. Ignatieff, qui ne fera connaître son point de vue que mercredi, après avoir consulté son caucus, n'a pas voulu donner d'indices sur la position qu'il privilégiait.

«Il y a des aspects positifs du budget, je crois, qui sont le résultat de la pression et de l'unité des partis d'opposition. Mais il y a aussi des côtés négatifs», a-t-il expliqué.

Le leader libéral se demande notamment si les conservateurs n'auraient pas sous-estimé les déficits à venir en faisant des prédictions économiques trop roses.

«Il y a des questions sur les chiffres, c'est-à-dire, est-ce qu'ils sous-estiment l'ampleur de la crise?» s'est-il interrogé.

M. Ignatieff a également confié se demander si les conservateurs en font assez pour les chômeurs dans ce budget et si l'argent qu'ils prévoient pour les investissements en infrastructures sera disponible pour les projets aussi rapidement que possible.

Ses vis-à-vis bloquistes et néo-démocrates, eux, s'opposent carrément à un budget qu'ils jugent insuffisant.

Pour le chef du Bloc, Gilles Duceppe, ce budget est tout à fait «inacceptable» pour le Québec, en raison notamment de la baisse des paiements de péréquation à la province ainsi que de l'insuffisance des fonds pour le soutien aux industries forestière et manufacturière.

Les baisses d'impôts ne sont pas assez ciblées, a-t-il déploré, alors que les paradis fiscaux sont maintenus, tout comme le délai de carence pour les travailleurs nouvellement sans emplois.

«C'est un budget qui de façon évidente, claire, nette, précise va à l'encontre de la motion unanime de l'Assemblée nationale», a-t-il lancé en référence à la motion adoptée par les 125 députés à Québec, et qui dressait une liste de demandes aux conservateurs.

Pour le chef néo-démocrate, Jack Layton, le budget n'aide pas assez les plus vulnérables.

«Ca ne crée pas les emplois pour le futur de notre économie, alors ça nous donne aucune confiance dans un gouvernement Harper», a soutenu M. Layton.

Les deux chefs ont invité M. Ignatieff à ne pas appuyer le budget, puisque la coalition demeure, à leur avis, une meilleure solution pour sortir de la crise économique.

Si les libéraux décident à leur tour de ne pas donner leur aval au budget, le gouvernement sera défait sur un vote de confiance. Il appartiendra alors à la gouverneure générale, Michaëlle Jean, de déclencher de nouvelles élections générales ou de confier la gouverne du pays à une coalition formée des libéraux et des néo-démocrates, avec l'appui du Bloc québécois.

S'ils accordent leur appui au budget Flaherty, ils permettront ainsi au gouvernement conservateur de se maintenir au pouvoir. Dans un tel cas, M. Ignatieff se trouverait à tourner le dos aux partenaires de cette coalition conclue avant Noël dans le but avoué de renverser le gouvernement Harper à la première occasion.