La coalition qui a failli renverser le gouvernement Harper est toujours bien vivante, malgré l'apparente tiédeur du nouveau leader libéral Michael Ignatieff, estime Gilles Duceppe.

«L'état des choses est strictement le même que lorsqu'on s'est laissé, dit le chef du Bloc québécois. J'ai parlé à M. Ignatieff avant le temps des Fêtes, j'ai parlé à M. Layton la semaine dernière. On va sûrement se reparler dans les jours qui viennent et je peux vous le dire, dans le huis clos au budget, il y aura certainement quelques discussions.»

 

M. Duceppe, qui a rencontré la presse à Montréal hier à l'occasion du caucus de son parti avant la rentrée parlementaire, a répliqué avec ironie aux questions portant sur l'attitude de M. Ignatieff, qui a semblé baisser le ton face au gouvernement Harper depuis deux semaines. «Je trouve qu'il y a un climat qui nous fait fonctionner, qui anime un peu tout le monde en disant: «Il semble que..., it seems, mes impressions». Parlons de faits.»

«Moi, je ne suis pas sur les sensations. Il y a d'autres temps et d'autres lieux pour ça», a-t-il lancé en riant.

La coalition unissant les libéraux et les néo-démocrates, à laquelle le Bloc a donné son appui, est mise à mal par l'intention des conservateurs d'offrir des baisses d'impôts dans leur budget, qui sera déposé le 27 janvier. Le NPD s'y oppose farouchement, alors que le Parti libéral se dit ouvert à des baisses aux plus démunis et à la classe moyenne. Gilles Duceppe, lui, refuse de se prononcer fermement contre des baisses d'impôts - sauf celles destinées aux riches et aux entreprises. «On ne dira jamais aveuglément non à quelque chose dont on ignore le contenu. Du côté de M. Harper, on nous répète la même chose: il y aura des baisses d'impôts. On a vu le grand succès de cette politique avec M. Bush aux États-Unis et M. Harper ici. Si c'est pour les compagnies, c'est un autre avantage indu aux pétrolières. Pour payer des impôts, une condition préalable des compagnies, c'est de faire des profits. Les manufacturières n'en font pas, n'en paient pas. Les individus les plus riches, eux, n'ont pas besoin de baisses d'impôts, certainement pas.»

Quant aux plus démunis, il se dit sceptique que les baisses d'impôts leur soient vraiment utiles. «Quand vous ne payez pas d'impôts, il est difficile d'en payer moins. Est-ce que ce n'est pas en bonifiant l'assurance emploi qu'on les aide? Nous, ce sont les choix qu'on propose.»

Au terme d'une tournée des régions du Québec, Gilles Duceppe se dit «fin prêt» à faire face à toutes les éventualités après le dépôt du budget Flaherty, y compris le déclenchement d'élections advenant la chute du gouvernement. Les bloquistes sont d'autant plus optimistes que l'étoile de Stephen Harper a encore pâli au Québec, soutient-il. «Une chose m'a frappée dans cette tournée: l'an dernier à cette date, nos sympathisants, et pas seulement la population, nous disaient: «M. Duceppe, Harper, y est pas pire!». Cette année, les mêmes gens nous disent: «Quand est-ce que vous allez nous débarrasser de Harper?» J'ai rarement vu quelqu'un perdre un capital politique aussi rapidement.»