Les réductions d'impôts massives de 300 milliards US envisagées par le président désigné Barack Obama afin de relancer l'économie américaine risquent d'accentuer la pression sur le ministre fédéral des Finances, Jim Flaherty, pour qu'il annonce aussi des baisses d'impôts dans son budget le 27 janvier.

M. Obama, qui entre officiellement à la Maison-Blanche le 20 janvier, veut réduire le fardeau fiscal des contribuables américains qui gagnent moins de 200 000 $US par année. Il calcule qu'une telle réduction du fardeau fiscal contribuera à «sauver ou créer» 3 millions d'emplois d'ici 2011. Environ 80 % de ces emplois seraient dans le secteur privé.

Le plan du nouveau président américain prévoit également un crédit d'impôt d'un an pour les entreprises qui embauchent des travailleurs, une mesure qui coûterait entre 40 et 50 milliards US, selon la presse américaine.

Ces mesures fiscales envisagées par la nouvelle administration américaine pourraient forcer la main au ministre des Finances, Jim Flaherty. Au cours des derniers jours, le grand argentier du pays a d'ailleurs évoqué l'idée d'inclure de nouvelles baisses d'impôts dans son budget qui sera déposé à la Chambre des communes le mardi 27 janvier. Ce budget déterminera l'avenir du gouvernement minoritaire conservateur de Stephen Harper.

«Il existe une couple de moyens pour stimuler l'économie. Un moyen est d'investir dans les infrastructures et l'autre est de diminuer les taxes et impôts pour laisser plus d'argent dans les poches des gens», a affirmé le ministre Flaherty en conférence de presse le 2 janvier.

Dans les rangs conservateurs, on a déjà évoqué l'idée d'éliminer pendant un an la taxe sur les produits et les services (TPS) sur certains biens afin d'encourager la consommation et stimuler l'économie.

Le ministre Flaherty sera d'ailleurs à Montréal aujourd'hui afin de poursuivre les consultations qu'il a entreprises le mois dernier dans certaines villes canadiennes en prévision de son prochain budget. Des représentants de plusieurs organisations québécoises ont été invités à cette rencontre au sommet.

«Le ministre prendra bonne note de toutes les propositions qui lui seront faites», a indiqué Chisolm Pothier, porte-parole de M. Flaherty.

La tâche du ministre s'annonce tout de même difficile. Les trois partis de l'opposition ont indiqué qu'ils n'hésiteront pas à renverser les conservateurs à la reprise des travaux parlementaires si le budget ne contient pas de mesures suffisantes pour relancer l'économie canadienne, déjà en récession, selon les estimations de la Banque du Canada.

La Presse a d'ailleurs appris qu'un groupe de députés libéraux, dont font partie John McCallum et Scott Brison, est en train de rédiger un plan contenant un train de mesures pour relancer l'économie canadienne qui pourrait être mis en oeuvre rapidement si le gouvernement Harper est défait sur son budget et que la gouverneure générale, Michaëlle Jean, demande à la coalition formée du Parti libéral et du NPD et soutenue par le Bloc québécois de prendre les commandes de l'État.

Dans une entrevue de fin d'année, le premier ministre Stephen Harper a indiqué que son gouvernement planche sur un train de mesures pour stimuler la croissance de l'économie qui pourrait se traduire par un déficit de 30 milliards de dollars.

Selon des informations obtenues hier par La Presse, le gouvernement Harper compte financer certains nouveaux programmes de relance d'une durée limitée - entre 18 mois et deux ans - afin d'éviter de retomber dans l'ornière des déficits, comme ce fut le cas dans les années 1970.

«Ce n'est qu'en imposant une fin à un programme qu'on peut éviter des déficits permanents. Si on ne fait pas cela, on s'expose à des demandes croissantes de financement», a confié une source gouvernementale digne de foi qui a requis l'anonymat.

Le député libéral John McCallum, ancien économiste en chef de la Banque Royale, a indiqué hier qu'il faut adopter un plan de relance qui donnera des résultats rapidement et qui n'entraînera pas des déficits permanents. Interrogé au sujet d'une réduction des impôts, M. McCallum a affiché la plus grande prudence.

«Une chose que je peux dire avec certitude, c'est qu'il faut avoir un stimulus majeur et le gouvernement n'a rien fait dans sa mise à jour économique de novembre. Il faut avoir beaucoup d'argent. Mais je pense qu'il faut maximiser les dépenses sur les infrastructures. Le pays a un déficit d'infrastructure qui est important. Cela dit, il faut éviter des déficits permanents. Je ne dis pas non aux réductions d'impôts, c'est que c'est permanent, à mois que l'on dise que ce soit temporaire», a dit M. McCallum.

Par ailleurs, le ministre Flaherty a rencontré hier à Toronto les représentants des grandes banques canadiennes à huis clos afin de faire le point sur l'état des marchés du crédit au pays.

Le mois dernier, le grand argentier du pays avait exprimé son inquiétude de voir les banques s'embarquer dans une spirale de resserrement du crédit offert aux entreprises et aux particuliers en ces temps de crise économique.

M. Flaherty et les dirigeants n'ont pas voulu rencontrer les journalistes mais leur rencontre a été «productive» et «plusieurs des défis économiques auxquels est confronté le pays ont été discutés», a affirmé par voie de communiqué la présidente de l'Association des banquiers canadiens, Nancy Hughes Anthony.

«Nous avons assuré le ministre que les banques sont prêtes à faire leur part pour aider le Canada à traverser la récession et qu'elles continuent à prêter aux emprunteurs de qualité», a-t-elle ajouté.

Avec La Presse Canadienne.