Au moment où le Canada semble déjà en récession, les trois partis de l'opposition à la Chambre des communes critiquent l'intention du gouvernement Harper d'attendre au prochain budget, prévu en février ou en mars, pour annoncer de nouvelles mesures afin de stimuler l'économie canadienne.

Alors que la Grande-Bretagne réduit temporairement la taxe de vente de 17% à 15% pour encourager les consommateurs à acheter et que le président élu des États-Unis, Barack Obama, planche sur un train de mesures pour stimuler la croissance même s'il ne prendra pas le pouvoir avant le 20 janvier, le Parti libéral, le Bloc québécois et le NPD s'expliquent mal la lenteur du gouvernement Harper à accoucher d'un plan.

En fin de semaine, le ministre des Finances, Jim Flaherty, a prononcé pour la première fois le mot «récession» pour décrire la situation économique actuelle durant une entrevue accordée au réseau CTV dans le cadre de l'émission Question Period. Le premier ministre, Stephen Harper, a aussi affirmé, en marge du Sommet de l'APEC à Lima, au Pérou, en fin de semaine, que les dernières estimations indiquaient que le Canada tomberait en récession durant le dernier trimestre de l'année 2008 et le premier trimestre de 2009.

Une récession survient lorsque le produit intérieur brut (PIB) diminue pendant deux trimestres consécutifs. Le ministre Flaherty doit faire une mise à jour économique et financière jeudi à 16h à la Chambre des communes. Le grand argentier du pays a fait savoir hier à Toronto qu'il ne profitera pas de l'occasion pour annoncer de nouvelles mesures pour soutenir la croissance économique. Il a dit vouloir attendre de déposer son prochain budget au début de l'année.

Aux Communes, hier, le Parti libéral, le Bloc québécois et le NPD ont tour à tour dénoncé la lenteur du gouvernement Harper à agir en cette période de turbulence économique.

Le critique libéral en matière de finances, John McCallum, a aussi accusé les conservateurs d'avoir induit les Canadiens en erreur durant la dernière campagne électorale.

«Il y a deux mois, le premier ministre a dit qu'il n'y aurait pas de récession si les conservateurs étaient élus. Il a ajouté que la création d'un déficit serait stupide -ce sont ses propres mots. Aujourd'hui, après les élections, il affirme exactement le contraire. Le Canada aura une récession conservatrice et le Canada aura un déficit conservateur», a dit M. McCallum.

Le chef bloquiste, Gilles Duceppe, a pour sa part affirmé que le Canada est l'un des rares pays industrialisés à ne pas avoir de plan à ce jour pour soutenir l'économie.

«Le premier ministre a reconnu qu'un déficit est à envisager au cours de la prochaine année. En fin de semaine, il a avoué, tout comme son ministre des Finances, qu'une récession était à nos portes. Alors que tous les pays de l'OCDE prennent des mesures pour stimuler l'économie et venir en aide à la population, le ministre des Finances lui, nous dit d'attendre au prochain budget. Le premier ministre ne réalise-t-il pas que c'est maintenant qu'il doit agir, pas dans trois mois?» a lancé M. Duceppe.

Plus tôt dans la journée, le Bloc québécois a proposé une série de mesures pour venir en aide aux familles durement touchées par la crise. Ce plan, qui coûterait 23 milliards sur deux ans, propose de créer un fonds qui verserait 20 cents aux entreprises pour chaque dollar investi dans l'achat de matériel de production, de créer un fonds de développement du logement abordable, d'augmenter le supplément de revenu garanti pour les aînés, d'offrir une remise de 4000$ pour l'achat d'une voiture verte et de mettre à la disposition des gens des fonds pour rénover leurs maisons afin de les rendre moins énergivores.

«Il me semble que M. Flaherty et M. Harper ne comprennent pas l'urgence de la situation. On doit agir plus rapidement qu'attendre jusqu'au budget du mois de mars. Les gens ont besoin de l'aide maintenant», a affirmé pour sa part le chef du NPD, Jack Layton.

De passage à Toronto, hier, le ministre Jim Flaherty a reconnu que les temps sont difficiles. Mais il a ajouté que le Canada affiche toujours le meilleur bilan économique des pays industrialisés.

«Le Canada se dirige vers ce ralentissement économique dans la meilleure position des pays industrialisés. Nous avons été prudents et responsables en remboursant 37 milliards de dollars de dette. Notre crédit est le meilleur au monde nous sommes dans une bonne position pour agir s'il le faut», a dit le ministre.