Vingt ans après avoir ratifié la Convention relative aux droits de l'enfant, et en dépit de notre loi sur la protection de la jeunesse, des droits fondamentaux des enfants continuent d'être bafoués, ici même au Québec.

«La Loi sur la protection de la jeunesse est une loi d'exception! Elle permet d'intervenir quand la sécurité d'un enfant est compromise, explique Nadia Pollaert, directrice générale du Bureau international des droits des enfants, à Montréal. Or les droits des enfants, c'est beaucoup plus large que cela!»

 

Quatre grands principes guident, depuis 20 ans, la Convention relative aux droits de l'enfant: intérêt supérieur de l'enfant, non-discrimination, survie et développement, participation de l'enfant. Or ces principes ne visent pas que les situations extrêmes d'enfants soldats, déportés ou battus. À preuve: le Québec est régulièrement montré du doigt pour le non-respect de ces principes, signale la directrice générale.

D'abord, l'exploitation économique et le travail des enfants est un phénomène fréquent au Québec. Il faut savoir qu'ici, le travail des jeunes est légal (une autorisation parentale suffit pour les jeunes de moins de 14 ans). Résultat, le taux d'emploi des jeunes est l'un des plus élevés de tous les pays de l'OCDE.

Le magazine L'actualité a révélé l'an dernier que les travailleurs âgés de moins de 24 ans ont aussi une fois et demie plus d'accidents que les autres, une proportion probablement bien en deçà de la réalité (combien de jeunes connaissent la CSST?). Et même si, d'après les normes du travail, un jeune ne devrait pas travailler de nuit, il n'est pas rare que des employeurs se fassent épingler pour violation de cette loi.

Autre enjeu important: la situation des jeunes autochtones. Quand un enfant autochtone est victime de négligence, faute de ressources suffisantes dans les réserves, il est souvent placé dans une famille d'accueil à des kilomètres de sa famille d'origine, ce qui n'est pas nécessairement dans son intérêt. «C'est un enjeu important pour le Canada et le Québec. Le Canada est souvent critiqué.»

Troisième enjeu: la traite des enfants. On pense ici à l'exploitation des jeunes par les gangs de rue. «Quand une fille autochtone débarque à Montréal et qu'elle est recrutée comme danseuse, même si elle a 15 ans et qu'elle dit qu'elle est consentante, c'est criminel. Un mineur ne peut pas consentir à se faire exploiter», rappelle Nadia Pollaert.

Enfin, les jeunes sans abri, souvent victimes d'exploitation et de maltraitance, sont aussi un sujet de préoccupation pour la communauté internationale.

Globalement, le problème réside dans le fait qu'on ne tient pas compte de l'intérêt supérieur de l'enfant, dénonce la directrice générale. Et cela se produit quotidiennement: pourquoi obliger un enfant à entrer au CPE en septembre alors que sa mère est encore en congé? Pourquoi tolérer qu'un jeune ait quatre enseignants dans une seule année scolaire? Comment accepter que, dans de nombreux cas de séparation (90% des séparations se réglant à l'amiable, donc sans médiation), les enfants manquent de stabilité, se retrouvant un jour chez l'un, le lendemain chez l'autre? «Est-ce que quelqu'un a déjà demandé à un enfant ce qu'il aimerait? Il faudrait qu'on écoute les enfants», conclut Nadia Pollaert.