Ce 11 novembre, jour du Souvenir, l'ancien combattant de la guerre de Corée, Gaston Delisle, rend hommage aux vétérans en même temps qu'il fête son 76e anniversaire. Deux bonnes raisons de défiler.

Il y a des dates qui nous collent à la peau. Comme un destin. Pour Gaston Delisle, le 11 novembre ne sera jamais dans l'ombre. C'est aujourd'hui qu'il célèbre son 76e anniversaire ainsi que le jour du Souvenir pour rendre hommage à ses frères d'armes qui, comme lui, ont combattu l'ennemi en Corée du Sud ou ailleurs.

 

Comme chaque année, le retraité arborera fièrement ses nombreuses décorations militaires lors du défilé. «Depuis 56 ans, je n'en ai pas manqué un seul», clame-t-il.

Le Québécois a débuté comme sous-officier durant la guerre en Corée du Sud. Il s'est battu sous l'uniforme du Royal 22e Régiment, venu prêter main-forte aux forces de l'ONU. Plusieurs dizaines de milliers de Canadiens ont combattu en Corée du Sud. Gaston Delisle, lui, s'est porté volontaire en décembre 1950. Il avait 18 ans. «Quand tu t'en vas, tu sais pas si tu vas revenir», se souvient-il.

Depuis, le Montréalais n'a rien oublié de ses heures passées dans les tranchées. «On s'appelait par nos noms de famille. Moi c'était 'Delisle'.» Parfois, on entendait les obus de mortier siffler au-dessus de nous. Un jour, un de mes camarades a été décapité à 20 mètres de moi. Lui, c'était 'Maisonneuve'.

Les conditions de vie étaient épouvantables. «Nous étions dans un trou, nous mangions de la nourriture en boîte, nous dormions peu. Nous faisions des changements de garde toutes les six heures, nous gardions le même uniforme.» Gaston Delisle passe ainsi six mois sur le front puis il a droit à un mois de repos. Puis, le manège recommence. Plusieurs membres de son groupe meurent au combat. «C'était dur. Alors pour tenir, on pensait à chez nous», confie-t-il. Il rentrera en avril 1952.

Une cinquantaine d'années plus tard, il dort toujours aussi peu. «Pas plus de quatre, cinq heures par nuit.»

À son retour, l'armée ne lui propose aucune aide psychologique. «Ça n'existait pas. Mais je suis bien. En rentrant, l'armée m'a aidé à acheter ma maison.» Il trouve du travail dans l'hôtellerie, où il reste jusqu'à sa retraite.

Il se marie, a trois enfants. À son entourage, il parle assez peu de la guerre. Quand on lui demande pourquoi, il répond: «C'est du passé.»

En revanche, le vétéran a besoin de s'entourer d'autres anciens combattants avec qui il partage cette expérience commune. Il est membre de la Légion royale canadienne et a aussi fondé l'Association canadienne des vétérans de la Corée, en 1980. «Lorsque je retrouve les vétérans, une fois par mois, il nous arrive de parler de la guerre.» Il les considère comme des membres de sa famille.

Si Gaston Delisle parle peu de son passé sous les drapeaux, il n'en demeure pas moins fier. «Si c'était à refaire, je le referais. Parce que nous nous battions contre notre ennemi, le communisme.»