Une enquête de police est préférable à une commission d'enquête publique sur les problèmes de la construction au Québec, estime René Roy, le secrétaire général de la FTQ.

«Pour nous, c'est une enquête policière qui doit être faite sur le blanchiment d'argent. Une enquête publique permettra aux lapins de se cacher», prédit-il. De nouveaux reportages de Radio-Canada sur les liens de la FTQ-Construction avec les motards criminels ainsi que le traitement privilégié de l'entrepreneur Tony Accurso par le Fonds de solidarité ont mis la plus importante centrale syndicale sur la sellette.

Pourtant, M. Roy reste convaincu qu'il «n'y a pas de ménage à faire à la FTQ». Pas davantage au Fonds de solidarité, d'ailleurs. «Il y avait quelques éléments de la FTQ-Construction qui étaient douteux, mais je pense que le ménage a été fait» résume-t-il.

«La FTQ a 580 000 membres, je ne les connais pas tous. Mais dans la direction de la FTQ, il n'y a pas de liens avec les Hells Angels», tranche-t-il.

Depuis l'été, dans l'entourage de Michel Arseneault, le président de la centrale, on a mis sur pied un comité de crise pour préparer des réponses rapides si la centrale ou le Fonds sont malmenés dans les médias. Dans un courriel qui circule largement, on invite les cadres à se réunir ce soir pour une écoute collective de l'émission Enquête, où on devrait diffuser une conversation d'un vice-président, Gilles Audette, enregistrée à son insu.

Aujourd'hui à l'Assemblée nationale, on débattra d'une motion de l'Action démocratique du Québec qui réclame une enquête publique sur les problèmes de l'industrie de la construction. Cette semaine, la chef péquiste, Pauline Marois, a joint sa voix à cette requête, que l'ADQ formule depuis le printemps.

La motion risque toutefois d'être battue aux voix ou fortement altérée, car le gouvernement propose déjà un autre texte: il faut prendre acte des enquêtes de la SQ en cours «sur des allégations de corruption, de malversation, de collusion et d'infiltration du crime organisé dans le domaine de la construction». Tout au plus le gouvernement Charest est-il prêt à «ne pas écarter au terme de ces enquêtes criminelles un recours à une enquête publique et indépendante».

Le syndicaliste René Roy reconnaît que l'image de l'organisation syndicale a été mise à rude épreuve depuis une série de reportages dévastateurs montrant les liens entre des syndiqués et les motards criminels. «Cela a sûrement un effet sur notre crédibilité. Dans une organisation si vaste, il y a parfois des choses qui se passent» déplore-t-il.

Il n'est pas impressionné par le reportage qui indiquait qu'un ancien Hells Angel avait pu convaincre un candidat potentiel à la direction de la FTQ-Construction de se retirer, en novembre dernier. Richard Goyette, le candidat de l'ex-directeur Jocelyn Dupuis, l'avait emporté contre Bernard Girard, associé à l'ancien président Jean Lavallée. Le retrait du candidat Dominic Bérubé n'a rien changé, selon René Roy: «L'élection s'est déroulée démocratiquement. Mais ceux qui ont perdu n'ont jamais accepté la défaite. Ils brassent de la merde parce qu'ils ont perdu l'élection.» Richard Goyette a lui aussi rejeté les allégations du reportage avec véhémence, hier.

Gilles Audette a séjourné dans les Caraïbes à bord du yacht de l'entrepreneur Tony Accurso en même temps que Michel Arseneault, l'automne dernier. D'autres figures en vue de la centrale sont aussi redevables à l'entrepreneur pour des vacances de rêve.

M. Arseneault, après avoir défendu l'entrepreneur de Laval, s'était excusé de tant de promiscuité.

«Le président de la FTQ a dit que, si c'était à recommencer, il n'irait pas sur ce bateau... la réponse est là», conclut René Roy.