Un journaliste canadien qui a vécu à Montréal pendant une dizaine d'années et travaillant pour le magazine Newsweek est détenu depuis dimanche matin en Iran.

Le magazine a confirmé par voie de communiqué que le correspondant canadien Mazia Bahari était détenu sans accusation depuis dimanche matin et qu'il était depuis sans nouvelle.

Newsweek a également défendu sa couverture des événements en Iran, affirmant qu'elle était «équitable et nuancée». Le magazine, qui réclame la libération immédiate du journaliste, affirme que son correspondait avait toujours bien travaillé avec les administrations en place à Téhéran, incluant l'actuelle.

Selon la publication américaine, M. Bahari vit et travaille à titre de correspondant en Iran depuis dix ans. Les informations disponibles sur Internet au sujet du journaliste indiquent qu'il est né en Iran en 1967. Il a étudié à l'Université Concordia, où il a obtenu un diplôme en communication.

Un collègue montréalais de Mazia Bahari affirme qu'il était très conscient des dangers liés à la pratique de son métier dans certains pays. Il avait d'ailleurs réalisé un documentaire, en 2005, sur l'impact des prises d'otages et des assassinats sur la couverture journalistique en Iraq.

Peter Svatek, qui a produit «Reporters in Iraq» avec le correspondant, le décrit comme un homme tranquille, sérieux et prudent. «Ce n'est pas un cowboy. Il est très au courant des dangers. Cela démontre à quel point la situation est volatile en Iran en ce moment», a affirmé M. Svatek, lors d'une entrevue accordée dimanche à La Presse Canadienne.

Dans ce documentaire, M. Bahari interroge des gens comme l'ex-journaliste canadien Scott Taylor, qui avait été enlevé puis détenu pendant cinq jours par les insurgés dans le nord de l'Irak.

Peter Svatek espère que les témoignages recueillis par son collègue dans le cadre du documentaire l'aideront à passer au travers de l'épreuve. «Il a parlé à tellement de gens dans la même situation, sur la façon dont ils ont réussi à la gérer et à survivre», a-t-il affirmé, ajoutant qu'il n'avait aucune idée pourquoi son collègue était détenu.

Les autorités iraniennes ont procédé à l'arrestation d'au moins 24 journalistes et blogueurs depuis le début des manifestations la semaine dernière, après la tenue d'élections.

En plus du Canadien, le président de l'Association des journalistes iraniens est également détenu. Et le correspondant de la British Broadcasting Corporation (BBC) a reçu l'ordre de quitter le pays.

Selon Benoît Hervieu, de l'organisme Reporters sans frontières (RSF), les journalistes représentent une cible prioritaire pour les autorités iraniennes. «Cela devient de plus en plus problématique pour les journalistes», a-t-il affirmé.

L'organisme basé à Paris a publié le nom de 23 journalistes iraniens, éditeurs et blogueurs arrêtés depuis le 14 juin et affirme avoir perdu contact avec d'autres qui pourraient être détenus ou qui se seraient cachés. M. Hervieu affirme que RSF a vérifié chaque arrestation grâce à son réseau de journalistes et d'activistes iraniens.

Dans la plupart des cas, les raisons pour lesquelles ces journalistes sont détenus demeurent floues.

Depuis longtemps, les autorités iraniennes surveillent de près les médias locaux et internationaux qui opèrent au pays. Mais depuis que le président sortant Mahmoud Ahmadinejad s'est déclaré vainqueur des élections tenues le 12 juin, elles ont adopté une attitude répressive à l'égard de ceux-ci. Les partisans du candidat réformiste Hossein Mousavi réclament quant à eux un recomptage des votes puisqu'ils estiment qu'il y a eu une fraude généralisée dans le processus électoral.

Les autorités ont également interdit aux médias internationaux de rapporter ce qui se passait dans les rues du pays. Elles permettent seulement les entrevues téléphoniques et les informations doivent provenir de sources officielles comme la télévision d'Etat. Plusieurs sites Internet ont également été fermés. L'Iran est particulièrement sensible aux reportages et aux blogues effectués en farsi, la langue officielle du pays.