Les contribuables devront payer une note de 2 millions $ pour les frais juridiques de Brian Mulroney engagés dans le cadre de la commission d'enquête sur ses relations d'affaires avec l'homme d'affaires allemand Karlheinz Schreiber, a appris La Presse Canadienne.

Cette somme s'ajoute aux 14 millions $ - ou plus - que devrait coûter la commission présidée par le juge Jeffrey Oliphant.

Jusqu'à maintenant, il avait été rapporté que M. Mulroney défrayait lui-même ses dépenses juridiques - une rumeur que ni son équipe d'avocats ni son équipe de relations publiques n'a tenté de corriger.

C'est toutefois l'impression qui s'était dégagée, puisque l'ancien premier ministre n'a pas demandé à avoir recours au financement public auprès de la commission.

Fred Doucet, un lobbyiste et ancien chef de cabinet de M. Mulroney, est le seul participant de la commission qui ait eu recours au financement public pour l'aider à payer une partie de ses frais juridiques.

En tant qu'ancien premier ministre, M. Mulroney n'avait cependant pas besoin de faire la demande auprès de la commission. En vertu d'une politique du Conseil du Trésor sur l'assistance judiciaire et l'indemnisation, ses frais sont assumés par le Bureau du Conseil privé (BCP).

Une porte-parole du Bureau, Myriam Massabki, a expliqué que 800 000 $ avaient été payés par le BCP pour les frais juridiques de M. Mulroney pour l'année financière 2008-2009, conformément aux niveaux de références établis. Une seconde somme de 1,25 million $ a également été mise de côté pour payer les frais juridiques de l'ancien premier ministre pour l'année courante, a ajouté Mme Massabki.

«Nous prévoyons que l'assistance juridique apportée à M. Mulroney pour la commission d'enquête coûtera environ 2 millions $ pour les deux années financières», a affirmé Mme Massabki.

M. Mulroney est accompagné, dans le cadre de la commission Oliphant, d'une équipe de six avocats, notamment son avocat principal, Guy Pratte, et l'éminent avocat Harvey Yarosky.

Mme Massabki a souligné que le paiement des frais de justice de M. Mulroney était conforme à une politique du Conseil du Trésor, qui «reconnaît que le versement d'une assistance juridique à un ancien ou un actuel fonctionnaire de la Couronne, comme des anciens premiers ministre, est essentielle à la protection des intérêts de la Couronne, au traitement équitable de ses fonctionnaires et à la gestion efficace de la Couronne».

«De plus, la politique s'assure que l'intérêt public est servi, en obtenant l'entière collaboration des fonctionnaires de la Couronne dans leur comparution à certaines procédures judiciaires, notamment les commissions d'enquête», a-t-elle ajouté.

Me Pratte a pour sa part fait valoir que M. Mulroney devrait peut-être tout de même puiser dans ses propres finances pour ses frais juridiques.

Mais le fait que les frais de justice de M. Mulroney soient assumés par les contribuables n'est pas sans précédent, a-t-il soutenu, rappelant que la même politique du Conseil du Trésor avait permis d'éponger les frais de justice de Jean Pelletier, l'ancien chef de cabinet de l'ancien premier ministre Jean Chrétien, lors de la commission Gomery, qui enquêtait sur le scandale des commandites.

C'est d'ailleurs Me Pratte qui avait représenté Jean Pelletier lors de cette commission d'enquête.

L'avocat principal de M. Mulroney a en outre indiqué qu'il n'était pas au courant des rumeurs laissant croire que l'ancien premier ministre ne payait pas lui-même ses frais de justice. De surcroît, personne ne lui a demandé qui payait la note, a-t-il argué.

Robin Sears, qui dirige l'équipe de relations publiques de M. Mulroney, a quant à lui affirmé qu'aucun effort n'avait été fait pour démentir la rumeur «parce que les clauses et les négociations entre le gouvernement et l'équipe juridique étaient et demeurent confidentielles».

De son côté, l'avocat de Karlheinz Schreiber à la commission Oliphant, Richard Auger, a affirmé mercredi que son client n'avait pas demandé de financement public pour rembourser ses frais de justice et qu'il n'en recevait pas.

C'est la deuxième fois que les contribuables se voient refiler la note des frais juridiques de Brian Mulroney en lien avec ses relations d'affaires avec M. Schreiber.

En 1996, le gouvernement fédéral a versé 2,1 millions $ à l'ancien premier ministre, lors d'un règlement à l'amiable qui mettait un terme à sa poursuite en diffamation lancée à la suite de la divulgation de l'existence d'une enquête de la Gendarmerie royale du Canada sur les allégations de pots-de-vin reliés à la vente des avions Airbus, en 1988.

La somme devait servir à rembourser les frais de justice de M. Mulroney.