La qualité de la construction laisse à désirer au Québec, notamment parce que la Régie du bâtiment n'exerce pas assez de surveillance sur les chantiers, affirment des associations d'architectes, d'entrepreneurs, de consommateurs, de propriétaires d'immeubles et de municipalités dans un rapport commandé par la Régie et obtenu par La Presse hier.

«Les associations d'entrepreneurs, les partenaires du secteur public, l'ordre des professionnels (les architectes) et les groupes d'intervenants sont unanimes pour dire que la surveillance n'est pas assez active, note le document, daté de juillet dernier. Les témoignages sont suffisamment éloquents à ce sujet.»

 

Le rapport, préparé par la firme de consultants Efficience International, cite les témoignages suivants: «Il y a un manque de surveillance par les professionnels et sur le contrôle de la qualité des ouvrages construits»; «Il n'y a pas assez d'inspections»; «Pour la surveillance de chantier, les contrôles de qualité crédibles qui répondent à la normalisation manquent.»

À la demande de la Régie du bâtiment, Efficience International a recueilli 450 témoignages auprès de représentants d'associations, comme l'Ordre des architectes, l'Association de la construction et l'Union des municipalités. La Régie souhaitait effectuer ce sondage afin de préparer son nouveau plan stratégique. Les consultants ont aussi questionné les cadres et des employés de la Régie. Le diagnostic est sévère.

«La majorité des groupes ont accordé une grande importance au fait qu'il faille augmenter le niveau de qualité de la construction, indique le rapport. Les associations de consommateurs et de propriétaires s'entendent pour dire que l'on construit des produits bas de gamme et qu'il y a un manque de surveillance sur les chantiers.

«On rencontre des problèmes de qualité de matériaux, un manque de rigueur dans la finition, sans trop se préoccuper de la conformité au code (du bâtiment) (...) C'est l'aspect financier qui dirige la qualité, on fait ça rapidement pour vendre au plus vite (...) Les trois quarts des groupes expriment le besoin de développer rapidement de nouveaux savoir-faire dans la construction. Le manque de formation continue est flagrant.»

Plusieurs personnes rencontrées par les consultants se sont montrées très critiques envers la Régie du bâtiment. «La Régie devrait servir le consommateur, avoir une mise en application centralisée, un rôle de chien de garde et de protection du consommateur, alors qu'elle est soumise à l'industrie de la construction», souligne un commentaire.

«On vit un recul sur l'application du code, dit un autre représentant d'association. Il y a un manque, ça régresse, c'est difficile d'avoir de l'aide de la part de la Régie.» «La Régie (en fait, les employés de la Régie) et certaines associations d'entrepreneurs constatent qu'il faudrait plus d'employés à temps complet à la Régie pour réaliser sa mission», ajoute le rapport. Les employés de la Régie estiment d'ailleurs que leur organisme devrait «effectuer un meilleur suivi et une meilleure planification des inspecteurs et des enquêteurs.»

Il y a deux mois, le Syndicat de la fonction publique du Québec a révélé que le nombre d'inspections est tombé de 55 300 en 2003 à 13 500 en 2008. «Les inspecteurs ne se pointent plus sur les chantiers, a déclaré Lucie Martineau, présidente du syndicat. Cette façon de gérer le risque comporte beaucoup plus de dangers pour les personnes.»

La Régie du bâtiment réfute ces allégations. «Nos façons de faire ont changé, mais la sécurité reste notre priorité, a dit hier sa porte-parole, Marjolaine Veillette. Nous travaillons sur la qualité des entrepreneurs, plutôt que sur les ouvrages comme tels. Nous faisons plus de sensibilisation et de formation.»