La grippe porcine n'a infecté personne au Québec, mais ses effets se font déjà ressentir chez les agriculteurs. Des centaines d'entre eux auront recours à des travailleurs saisonniers mexicains, dans les prochains mois, une pratique qui pourrait être freinée net si le mystérieux virus poursuit sa progression.

Laurent Cousineau s'inquiète de l'expansion de la maladie. Pour sa santé, certes, mais aussi pour celle de son entreprise, Les Jardins Paul Cousineau et Fils. Avec une production annuelle de 500 000 boîtes, c'est le plus important cultivateur de brocoli au Canada.

 

«Ça risque de tous nous toucher, résume l'entrepreneur de Saint-Constant, sur la Rive-Sud de Montréal. Pour l'instant, c'est un feu qui dort.»

Cette ferme familiale a embauché 100 travailleurs étrangers pour semer et récolter les plants de brocoli. La moitié d'entre eux viennent du Mexique et un groupe de 20 est arrivé en avion vendredi. Aucun ne présente des symptômes suspects, mais les administrateurs comptent rester aux aguets.

«Autant pour mes travailleurs étrangers que les locaux, il faut éviter qu'une pandémie se déclenche par une source qui serait mes travailleurs», explique M. Cousineau.

Une pratique répandue

Près de 500 entreprises québécoises, surtout des fermes, embaucheront 6500 travailleurs saisonniers cette année. La majorité du contingent vient du Mexique. Si les inquiétudes de l'Organisation mondiale de la santé (OMS) se confirment et que la grippe porcine devient une pandémie, ces employés pourraient être stoppés aux douanes pour empêcher la propagation de la maladie.

«Ce serait un désastre parce qu'on n'a pas, ici, la main-d'oeuvre locale pour combler les pénuries», affirme René Mantha, qui dirige la Fondation des entreprises en recrutement de main-d'oeuvre étrangère (FERME).

L'organisme est d'autant plus préoccupé que le plus gros contingent de travailleurs saisonniers doit s'amener au Québec dans les prochaines semaines pour la période des semences. Il attend d'ailleurs 300 Mexicains la semaine prochaine, et presque autant de Guatémaltèques qui feront escale à Mexico avant de venir ici.

Des représentants du gouvernement canadien rencontreront les autorités mexicaines demain matin pour déterminer la marche à suivre dans ce dossier. D'ici là, l'Union des producteurs agricoles dit suivre la situation de près.

Un «coup dur»

«Sans remettre en question tout motif sociosanitaire qui le justifierait, explique le porte-parole Patrice Juneau, il demeure qu'empêcher ou retarder leur venue au Québec serait un coup dur pour les centaines de producteurs horticoles et autres qui comptent sur ces travailleurs pour combler la pénurie de main-d'oeuvre agricole.»