Le retour au pays de la dépouille de la soldate Karine Blais, tuée lundi en Afghanistan, a provoqué un certain malaise au sein des Forces armées canadiennes, hier.

C'est que l'avion transportant le cercueil de Mme Blais de Kandahar au Canada a fait une escale à l'aéroport militaire d'Uplands, à Ottawa, afin de permettre à 117 soldats de débarquer au lieu de se rendre directement à l'aéroport de Trenton, en Ontario.

 

Les soldats en question ont été contraints de récupérer leurs effets personnels et leurs bagages, dont certains étaient tout près du cercueil de Karine Blais, qui était de la base militaire de Valcartier.

Dans le passé, l'avion transportant les corps des soldats morts au combat a toujours atterri à Trenton. Telle était la pratique dans le cas des 116 soldats tués avant l'incident qui a coûté la vie à Karine Blais. Leur cercueil était également retiré de l'avion en premier afin de rendre l'hommage militaire qui est de mise lorsqu'un soldat est tué sur le champ de bataille.

Mais contre toute attente, les autorités militaires ont décidé de passer outre à cette pratique pour des raisons de logistique. Il était préférable, selon elles, de faire d'abord escale à Ottawa afin de permettre aux soldats qui avaient terminé leur séjour en Afghanistan de rentrer au bercail plus tôt au lieu de leur imposer un voyage en autobus à partir de Trenton.

Cette décision n'a guère plu aux soldats qui connaissaient Karine Blais, qui était âgée de 21 ans seulement et qui était arrivée en Afghanistan il y a deux semaines.

Pis encore, les drapeaux du Canada à l'aéroport militaire d'Ottawa n'avaient pas été mis en berne lorsque l'avion s'est posé hier midi. La décision d'atterrir dans la capitale fédérale a été prise à Kandahar plus tôt cette semaine.

Un soldat canadien toujours à Kandahar a expédié un courriel au réseau CTV pour dénoncer cette situation. «La dépouille de la soldate Blais n'est pas traitée avec tous les égards qui s'imposent. (...) Les soldats devront récupérer leurs bagages autour de son cercueil. Ce n'est pas lui témoigner le respect qu'elle mérite», a affirmé le soldat dans ce courriel. Il a exigé l'anonymat afin de ne pas faire l'objet de représailles de la part de ses supérieurs.

Le soldat Scott Holmes, qui était à bord de l'avion qui transportait la dépouille de Karine Blais, a déclaré au réseau CTV hier qu'il aurait nettement préféré faire le voyage avec sa compatriote jusqu'à Trenton afin de lui rendre hommage.

Excuses des Forces armées

En début de soirée, le chef d'État-major des Forces armées canadiennes, le général Walt Natynczyk, a offert ses excuses dans une déclaration écrite. «Je désire présenter mes plus sincères excuses à tous ceux qui pourraient avoir été offensés par la décision de rapatrier des soldats à Ottawa avant le rapatriement final de notre camarade tombée au combat, la cavalière Karine Blais. Ayant personnellement assisté à plusieurs cérémonies de rapatriement à Trenton, je peux assurer l'ensemble des Canadiens que nous avons pour objectif de traiter tous les militaires tombés au combat avec respect, dignité et honneur et que nous avons l'intention de continuer à faire respecter cette politique «, a-t-il dit.

Malgré cette controverse, la cérémonie pour la soldate Karine Blais qui a eu lieu à l'aéroport de Trenton était empreinte d'émotion. La gouverneure générale du Canada, Michaëlle Jean, et le ministre de la Défense, Peter MacKay, étaient présents.

La famille de la disparue s'est recueillie pendant quelques instants sur son cercueil. Plusieurs personnes se tenaient derrière les grillages entourant la base pour rendre un dernier hommage à la militaire de 21 ans.

Son cercueil a ensuite été placé dans un véhicule qui a roulé en direction de Toronto. Le cortège funèbre a été salué par de nombreuses personnes qui s'étaient massées sur les viaducs de l'autoroute 401 pour l'occasion.

Karine Blais, de la base de Valcartier, a été tuée et quatre autres militaires ont été blessés par l'explosion d'une bombe dans le district de Shah Wali Kot, au nord de Kandahar, en Afghanistan. L'identité des quatre militaires blessés n'a pas été révélée. Elle était la deuxième femme à perdre la vie en Afghanistan.