Transports Canada n'arrive toujours pas à vérifier adéquatement les liens criminels des employés des aéroports à qui des autorisations de sécurité sont octroyées, laissant ainsi la porte ouverte à des gens qui pourraient être liés au crime organisé ou encore impliqués dans le trafic de drogues.

«L'échange de renseignements de nature criminelle entre Transports Canada et la Gendarmerie royale du Canada demeure inefficace. Il se peut que Transports Canada autorise encore des personnes présentant un risque élevé et ayant un casier judiciaire à pénétrer dans des zones aéroportuaires réglementées», constate la vérificatrice générale, Sheila Fraser, dans son rapport annuel qui fait le point sur les progrès réalisés à la suite de recommandations qu'elle a formulées dans le passé.

 

En mars 2004, elle avait sonné l'alarme sur les lacunes dans les vérifications menant à l'octroi d'une cote de sécurité. Depuis, en matière de gestion des renseignements de sécurité, les efforts consentis ont donné des résultats inégaux, soutient Mme Fraser dans son rapport déposé hier à la Chambre des communes.

Dans plusieurs ministères et organismes, des obstacles juridiques empêchent l'échange de renseignements de sécurité, soulève la vérificatrice. À Transports Canada, il n'existe pas de critères établis pour distinguer les demandeurs posant un risque accru pour la sécurité de ceux qui ont commis des infractions moins graves.

La vérificatrice mentionne un cas où un laissez-passer a été accordé à une personne «déclarée coupable de voies de fait et d'infractions relatives aux armes, et qui faisait l'objet d'une enquête portant sur un meurtre lié au trafic des stupéfiants dans un grand aéroport».

La «faille dans le système», selon Mme Fraser, se situe au niveau de l'interprétation de la loi: Transports Canada, en théorie, n'est tenu de refuser l'autorisation de sécurité qu'aux gens qui représentent une menace pour les avions ou les passagers.

«Il faut que Transports Canada revoie son rôle. Peut-être même que ça demanderait une clarification de la loi, explique-t-elle. Ils ne se préoccupent pas de l'activité criminelle qui pourrait se produire dans les aéroports. Si eux ne veulent pas prendre cette responsabilité, au moins qu'ils travaillent plus étroitement avec la GRC pour qu'elle puisse faire les enquêtes approfondies nécessaires.»

«Il me semble que c'est un minimum d'essayer de minimiser l'activité criminelle», ajoute Mme Fraser.

Le ministre des Transports, John Baird, a accusé le coup, promettant de remédier rapidement à la situation. «Je suis d'accord avec ces recommandations. C'est quelque chose qui est haut dans ma liste de priorités, a-t-il souligné. On travaille avec la GRC. On doit conclure un accord pour que l'information soit disponible. Et si dans les prochains 10 jours ce n'est pas accompli, je vais convier les groupes dans mon bureau et personne ne pourra partir avant que l'accord soit conclu.»

La situation s'est par contre nettement améliorée depuis 2004 dans la gestion, l'organisation et la coordination des renseignements de sécurité dans les différents ministères et organismes qui sont concernés, souligne le rapport de la vérificatrice. Entre autres, le gouvernement a réduit son retard dans le traitement des empreintes digitales et a pris des mesures pour rendre plus fiables les listes de personnes à surveiller. Plusieurs des recommandations faites dans les rapports de 2003 et 2004 ont mené les autorités à améliorer leurs façons de faire.

Le gouvernement s'est par ailleurs engagé à poursuivre ses efforts pour assurer l'efficacité des échanges d'informations tout en protégeant les renseignements personnels.

Passeport Canada sera prêt

Ayant tiré des leçons de ses erreurs passées, Passeport Canada est maintenant prêt à faire face à une hausse accrue des demandes de passeports prévue dans les prochains mois, estime Sheila Fraser.

Début 2007, l'organisme avait été pris au dépourvu par une augmentation soudaine des demandes, avec l'entrée en vigueur de la phase I de l'Initiative relative aux voyages dans l'hémisphère occidental (IVHO), qui contraint les Canadiens à se munir d'un passeport pour franchir la frontière américaine par voie aérienne.

La phase II de l'IVHO, exigeant le passeport pour se rendre aux États-Unis par voie maritime ou terrestre, entrera en vigueur le 1er juin 2009, laissant présumer qu'il y aura un fort achalandage de demandes dans les prochains mois.

«Le ministère a construit et équipé un nouveau centre de traitement et d'impression des demandes reçues par la poste, pris des mesures pour simplifier le traitement des demandes présentées en personne, et engagé plus de personnel», souligne la vérificatrice générale, qui estime que Passeport Canada a fait beaucoup d'efforts pour corriger les problèmes survenus en 2007, où l'organisme avait été incapable de répondre à la demande.

Par ailleurs, le commissaire à l'environnement, Scott Vaughan, constate, dans son rapport rendu public en parallèle à celui de la vérificatrice générale, que les autorités fédérales ont fait de nombreux progrès sur deux questions environnementales soulevées dans le passé, soit la salubrité de l'eau et la qualité de l'air.

 

Évasion fiscale des PME

L'Agence du revenu du Canada peine à épingler les petites et moyennes entreprises qui ne paient pas leurs impôts, constate le rapport de la vérificatrice générale. Selon Sheila Fraser, l'Agence doit améliorer la façon dont elle cible les entreprises à vérifier pour revenus non déclarés. «La moitié de ses vérifications liées à l'économie clandestine au cours des cinq dernières années n'ont pas permis de détecter des revenus non déclarés», souligne le rapport. Le montant des revenus non déclarés que l'Agence a pu constater est demeuré stable, souligne la vérificatrice générale.

 

Processus de nomination trop lent

La vérificatrice générale s'inquiète, dans son rapport, des conséquences que pourrait avoir un processus de nomination dans les sociétés d'État et les autres organisations fédérales jugé trop lent. À la Commission de l'immigration et du statut de réfugié (CISR), surtout, Sheila Fraser constate que les postes vacants sont nombreux et craint que les retards continuels dans les nominations ne nuisent au bon fonctionnement de l'organisme. «L'accumulation des revendications de statut de réfugié entraîne des coûts humains, sociaux et financiers élevés», note la vérificatrice générale. Le ministre de l'Immigration, Jason Kenney, a jugé que le problème constaté par Mme Fraser était maintenant chose du passé. «Depuis que la vérificatrice générale a écrit son rapport, on a nommé 41 nouveaux membres de la CISR. Le problème est résolu», a dit M. Kenney.