La campagne Ici, on commerce en français ne lève pas: 400 000$ plus tard, les autocollants sont à peu près invisibles au centre-ville de Montréal et dans le Vieux-Montréal.

Rue Sainte-Catherine, on n'a vu que trois de ces petits autocollants au total: l'un chez Gap, un chez Banana Republic et un autre chez Toyota. Dans le Vieux-Montréal, on n'en a vu aucun.

 

«On en est conscient, c'est vrai que je n'en ai pas vu beaucoup moi-même», dit Martin Bergeron, porte-parole de l'Office québécois de la langue française, qui est à l'origine de ce programme de promotion.

Au plus fort de la campagne, en décembre et janvier, entre 3500 et 4000 autocollants ont été distribués dans les commerces, dont 50% au centre-ville, dit M. Bergeron.

En pure perte puisque les autocollants n'ont pas été apposés dans les vitrines.

Pourtant, note M. Bergeron, les gens ont largement entendu parler de la campagne de publicité, qui a très bien marché dans les journaux et sur l'internet. Selon un sondage commandé par l'Office, 56% des gens interrogés se souvenaient d'en avoir entendu parler.

«En décembre et janvier, ce n'était qu'un coup d'envoi, poursuit M. Bergeron. Nous entendons relancer les associations de commerçants, refaire des relations publiques.»

Avec quel argent puisque le budget de 400 000$ a déjà été dépensé? Comme il s'agit d'un budget récurrent, l'Office disposera, à compter du 31 mars, de 400 000$ supplémentaires, explique M. Bergeron.

La campagne québécoise aura au moins trouvé un écho à San Francisco, où se trouve le siège social de Gap, présent à Montréal sous les bannières Gap, Banana Republic et Old Navy. «L'Office de la langue française nous a demandé si on voulait participer et on a dit oui», explique Pascale Ruimy.

L'entreprise n'a pas eu à répondre à des exigences particulières, ajoute-t-elle, car l'Office fait un suivi régulier dans ses magasins. «Quelques clients nous ont dit qu'ils avaient aimé l'autocollant», dit Mme Ruimy.

Si quelques auteurs de lettres dans les journaux se sont montrés sceptiques quant à la pertinence de cette campagne quand elle a été lancée, il n'y a aucun signe de boycottage du côté de la chambre de commerce du Montréal métropolitain. «Nous appuyons cette campagne. À mon avis, ce qui est important, c'est de créer un sentiment de fierté collective», dit Michel Leblanc, président et chef de la direction de la chambre de commerce.

Peter Simons, PDG des magasins Simons, n'est quant à lui pas très enthousiaste à l'égard de cette campagne. Il n'a pas du tout maille à partir avec l'Office de la langue française, précise-t-il, mais il se demande bien pourquoi il devrait apposer un petit autocollant dans sa vitrine. «Il est vraiment évident que l'on sert en français. Ce serait une aussi grosse évidence que si nous écrivions dans la vitrine: «Ici, il y a de l'eau courante.»»

La campagne Ici, on commerce en français a été lancée dans la foulée de la controverse amorcée par une série d'articles publiés dans un quotidien montréalais. Dans le cadre de ce reportage, la journaliste sollicitait un emploi dans le domaine du service à la clientèle, s'avouait unilingue anglophone et décrochait quand même des boulots.

Pour la petite histoire, autocollant ou pas, signalons ici que, cette semaine, dans les boutiques du centre-ville, nous avons presque toujours été accueillis par un «Bonjour» ou par un «Allô, hello» prononcé de façon neutre, suivi d'un service dans la langue de notre choix.