Un groupe de citoyens et d'universitaires demande au gouvernement d'intervenir pour bloquer la vente d'un bâtiment appartenant à l'Université de Montréal. Les Défenseurs du Mont-Royal veulent empêcher le Groupe F. Catania de bâtir des appartements de luxe dans l'ancien couvent Mont-Jésus-Marie.

Cette intervention survient alors que la consultation publique sur le projet doit reprendre ce soir. Les opposants ont récolté les signatures de 1200 voisins et universitaires qui souhaitent empêcher la transaction.

«C'est un bien public qui est en continuité naturelle avec le campus de l'Université de Montréal, affirme le porte-parole du groupe, Pierre Labelle. C'est une partie de notre patrimoine collectif, un bien public qui devient un bien privé.»

M. Labelle affirme que l'institution doit à tout prix trouver un moyen de conserver la vocation éducative du bâtiment, sans quoi il appellera Québec à l'aide. C'est que l'ancien couvent, situé dans l'arrondissement historique du mont Royal, est assujetti à des règles d'urbanisme strictes, dictées en outre par le ministère de la Culture.

«Ultimement, on en appelle à la ministre de la Culture, qui a le dernier mot si la Ville continue dans son projet», affirme M. Labelle.

Au bureau de la ministre Christine St-Pierre, on indique qu'il est trop tôt pour intervenir. Pour l'heure, seule la Ville de Montréal a le pouvoir de stopper la vente du bâtiment en invoquant ses règlements sur le zonage, explique l'attachée de presse Valérie Rodrigue. En revanche, le Ministère devra donner son approbation au projet avant que le promoteur obtienne un permis de construction.

Un bâtiment patrimonial

Le vaste immeuble de pierre brune construit en 1925 a été la maison mère des soeurs des Saints-Noms-de-Jésus-et-de-Marie jusqu'en 2003. La congrégation l'a alors vendu à l'Université de Montréal pour la somme de 15 millions.

À l'origine, l'Université souhaitait y aménager des salles de cours et des laboratoires. Mais les coûts de rénovation, estimés à l'origine à 54 millions, ont explosé. Selon ses derniers calculs, l'Université aurait dû débourser 130 millions pour mener son projet à terme.

Elle a sollicité l'aide du gouvernement et de donateurs privés pour financer les travaux, mais en vain. Elle a donc mis l'immeuble en vente par appel d'offres à l'été 2007.

«S'entêter dans ce projet aurait été une grave erreur, affirme le vice-recteur aux communications de l'Université, Philippe Beauregard. Notre première obligation, c'est envers notre bailleur de fonds, le ministère de l'Éducation. C'est une question de bonne gestion des finances publiques.»

Seuls des promoteurs privés ont soumissionné. Aucune institution publique n'a montré d'intérêt.

L'Université a finalement retenu l'offre du Groupe F. Catania, qui souhaite aménager 123 appartements en copropriété et construire un stationnement souterrain de 222 places. Le promoteur promet de conserver la façade du bâtiment, de reboiser une partie du stationnement et de permettre au public d'accéder au mont Royal par un sentier qui traverse la propriété.

Il n'a pas été possible de joindre un porte-parole du Groupe F. Catania, hier. Mais dans la proposition qu'elle a déposée à l'Office de consultation publique de Montréal, l'entreprise assure que le projet «s'inscrit dans une vision intégrée au contexte de l'arrondissement historique et naturel du mont Royal, tout en respectant les caractéristiques patrimoniales de l'ancien couvent».

Les deux propriétaires du Groupe F. Catania et Associés sont également propriétaires de Construction Frank Catania. Cette entreprise était partenaire de la Société d'habitation de Montréal (SHDM) dans un développement immobilier de l'est de la métropole, les Faubourgs Contrecoeur.

Ce partenariat fait l'objet d'une enquête, car l'entreprise a acquis un terrain évalué à 31 millions pour la somme de 4,4 millions. La Ville avait précédemment cédé ce terrain à la SHDM pour 1,6 million.