«Il faut trouver une solution, et ça presse. Sensibiliser les camionneurs, revoir les normes. Je ne suis pas une experte, mais je sais qu'il faut faire quelque chose.»

Hélène Corbeil n'est peut-être pas une experte, mais elle sait de quoi elle parle: en décembre 2007, la Montréalaise de 58 ans a été renversée par un camion de déneigement à l'angle des boulevards Henri-Bourassa et Armand-Bombardier.Multiples fractures, perforation du poumon, artère déchirée... Elle a passé deux mois et demi à l'hôpital et autant de temps dans un centre de réadaptation. Encore aujourd'hui, elle va en réadaptation trois ou quatre fois par semaine et n'a toujours pas recommencé à travailler.

Les accidents survenus cette semaine à Montréal l'ont troublée. Mardi, trois septuagénaires ont péri sous les roues de camions de déneigement dans deux accidents distincts. Les piétons avaient la priorité, mais il semble que les camionneurs, tous les deux employés d'entreprises privées, ne les aient pas vus.

«Ces accidents sont survenus dans les mêmes circonstances que le mien, dit Hélène Corbeil. Qu'est-ce que ça va prendre pour que ça change?»

Des pistes de solution

La mort des trois piétons a eu un écho jusqu'au ministère des Transports du Québec, hier. La ministre Julie Boulay a communiqué avec le président de la Société de l'assurance automobile du Québec (SAAQ), John Harbour, pour lui demander d'«analyser la situation».

«La ministre souhaite commencer à agir avant le dépôt du rapport du coroner», a déclaré son attaché de presse, Sylvain Leclerc. Julie Boulay a demandé à M. Harbour de «déterminer les gestes» à faire pour éviter que d'autres accidents du genre se produisent. La SAAQ devrait faire un premier compte rendu «dans les prochaines semaines», selon M. Leclerc.

Entre-temps, l'industrie du camionnage a soulevé plusieurs problèmes liés au déneigement. «Étant donné la façon dont le système fonctionne, de tels accidents vont se reproduire», a lancé François Pilon, propriétaire de l'entreprise Déneigement Côte-des-Neiges.

M. Pilon est sous-traitant pour l'arrondissement de Côte-des-Neiges. Son entreprise possède une dizaine de camions et de tracteurs de déneigement. Pour accomplir le travail, il donne des contrats à des camionneurs indépendants qui possèdent leur propre véhicule.

«Pour payer leur camion, qui leur coûte entre 2500$ et 3000$ par mois, les gars travaillent souvent pour plusieurs entrepreneurs. Ils roulent parfois 24, 36 heures de suite.» François Pilon souligne que les accidents de mardi sont survenus une semaine après la tempête. À ce stade-là, les camionneurs sont épuisés, dit-il.

Autre contrainte: des arrondissements imposent des amendes aux sous-traitants si le déneigement n'est pas fait dans le temps prévu.

Le président de l'Association nationale des camionneurs artisans, Clément Bélanger, estime que les arrondissements devraient payer davantage les camionneurs. «La Ville les paie au volume. Comme les tarifs sont bas, les conducteurs sont portés à en faire le plus possible», a-t-il souligné.

Loi c-430: plus de 700 contraventions à Montréal

En vertu de la loi C-430, les conducteurs de véhicules lourds ne peuvent travailler plus de 70 heures au cours d'une période de sept jours consécutifs. En 2008, les contrôleurs routiers et les inspecteurs de la SAAQ ont remis 730 contraventions aux camionneurs, à Montréal. Le conducteur fautif s'expose à une amende de 450$. La contravention est de 900$ pour l'exploitant.