Les automobilistes québécois se sont massivement conformés à la nouvelle Loi qui les forcent à chausser leurs véhicules de pneus d'hiver, à en juger par une enquête éclair menée lundi par La Presse. Les garages étaient toutefois pris d'assaut par les retardataires.

C'est par un temps maussade et pluvieux que cette nouvelle réglementation québécoise est entrée en vigueur lundi.

Au garage Pneus Théo Gosselin de Laval, la salle d'attente était presque aussi achalandée que celle d'une clinique médicale.

Au comptoir, le téléphone ne dérougissait pas. «Aujourd'hui, c'est un peu la cohue!», a lancé Marcel Matte, un employé.

Majeed Ali et son fils Shashem étaient assis dans la salle d'attente du garage. Ils ont repoussé à l'extrême le moment pour remplacer leurs pneus. «Ça commençait à glisser. J'ai attendu longtemps parce que j'attendais ma paye», a justifié Shashem.

L'argent, mais aussi la difficulté à trouver les pneus adéquats, expliquent pourquoi Tommy Sklivas a décidé d'attendre jusqu'à lundi pour se présenter au garage. «Ça fait un gros trou dans mes poches, mais c'est certain que ça va aider à contrer les accidents», a nuancé ce Montréalais.

Selon les employés du garage, la grande majorité des gens ont posé depuis belle lurette leurs pneus d'hivers. La période de pointe de la pose de pneus s'est étirée sur quatre mois au lieu des six à huit semaines habituelles, en grande partie à cause de la grande médiatisation du nouveau règlement. «Les gens sont probablement chaussés en hiver à 98% et les autres 2% sont actuellement en train de poser leurs pneus au garage», a blagué Éric Lafrance, gérant chez Pneus Théo Gosselin.

Ce «spécialiste du pneu» a accepté de participer à un coup de sonde plus ou moins scientifique, visant à débusquer les automobilistes qui ont encore leurs pneus d'été ou quatre saisons.

Nous avons choisi l'immense stationnement du Carrefour Laval, bondé à l'approche des fêtes, pour mener notre exercice.

Sur une centaine de véhicules inspectés, seul un vieux Blazer blanc avait encore des pneus quatre saisons. Tout les autres se sont mérités une note parfaite. «Je suis étonné de voir à quel point ce sont des pneus en bonnes conditions, souvent neufs», a remarqué notre spécialiste.

Grâce au nouveau règlement, le gérant a augmenté ses ventes d'environ 25%. «Il y avait des gens un peu révoltés par la Loi qui nous disait : Vous devez être contents vous autres! Bon, peut-être un peu finalement, j'ai été obligé de voter pour Jean Charest!», a-t-il plaisanté.

Installé depuis 34 ans sur la rue Masson à Montréal, le centre Shell Guay prévoit aussi poser les pneus de retardataires tous les jours cette semaine. Le nouveau règlement a aussi fait rager plusieurs clients de l'endroit. «Surtout les gens de Montréal, qui utilisent moins leurs voitures», a ajouté le propriétaire Marc Lapointe.

Contents ou non, les automobilistes québécois n'ont pas le choix de se plier à cette obligation. «Il n'y a pas de période de grâce», a prévenu l'agente Joyce Kemp, de la Sûreté du Québec.

Les policiers vérifieront si les automobilistes respectent le règlement lors des collisions et des barrages routiers pour l'alcool au volant. «On va aussi observer le comportement des véhicules sur une chaussée glissante», a ajouté l'agente Kemp.

Les véhicules doivent être munis de pneus d'hiver entre le 15 décembre et le 15 mars. Les conducteurs délinquants s'exposent à des amendes variant entre 200 et 300$.

Certificats d'exemptions

Les pneus d'hiver sont obligatoires pour tout le monde. Par contre, des certificats d'exemptions d'une semaine sont émis par la Société d'assurance automobile du Québec (SAAQ) aux snowbirds, aux nouveaux propriétaires de véhicules ou aux gens qui ramènent au Québec une voiture louée à l'extérieur de la province. En date de la semaine dernière, 6000 de ces certificats avaient été émis. Les gens peuvent en exiger quatre par année. Le certificat permet aux snowbirds d'entrer et sortir du Québec sans se faire embêter, mais pas de se promener librement lors de leurs séjours dans la province. La SAAQ avoue avoir vécu quelques problèmes au niveau de l'interprétation de la Loi. «Il y a des gens qui pensaient que rabouter trois certificats ensemble leur permettrait de gagner du temps, même s'ils ne vont pas dans le sud», a cité en exemple la relationniste Audrey Chaput.