En début de soirée, le 24 novembre 2007, Marchath Marseilles a tiré une balle dans le front de David Mutunzi, 17 ans, qui s'est effondré par terre dans l'appartement de la rue Forest, à Montréal-Nord. Puis il a tiré sur Rachid*, 15 ans. «Mais le coup n'est pas parti, ç'a fait clac», a péniblement raconté Simon, hier, au procès de Marseilles.

Marseilles, âgé de 20 ans, est accusé du meurtre non prémédité du jeune Mutunzi, et de tentative de meurtre sur Rachid. Ce dernier aurait eu la vie sauve parce que l'arme s'est enrayée. Quant au corps de David, il n'a jamais été retrouvé. C'est en tremblant, en pleurant à certains moments et en fusillant l'accusé du regard, que Simon, 20 ans, a raconté hier au jury dans quelles circonstances le drame s'est produit, sous ses yeux, il y a deux ans. Ce soir-là, un samedi, Simon, Rachid et David devaient se rendre dans une fête dans un club de Laval. Ils se sont retrouvés vers 18h30 dans l'appartement de Michel, le frère de Simon. Sur place, il y avait déjà Marseilles. Ce dernier s'était offert pour les conduire à la danse, dans sa Cadillac blanche. Mais selon le récit que Rachid et Simon ont livré au jury, Marseilles a sorti une carabine, l'a pointée sur David et a exigé qu'il lui donne son argent.

 

«David n'avait pas d'argent. Marseilles a tiré. David est tombé par terre. Mon frère Michel est tombé à terre aussi, mais il s'est relevé tout de suite», a raconté Simon, hier. Ensuite, Marseilles a tiré sur Rachid, mais l'arme n'a pas marché. Simon et Rachid se sont précipités dehors, attrapant leurs chaussures restées sur le palier. Ils ont couru plusieurs mètres en chaussettes dans la neige, avant d'enfiler leurs souliers.

Sous le choc

Affolés et sous le choc, ils se sont rendus dans une pizzeria, à l'angle des rues Henri-Bourassa et Garon. Michel les a appelés et est venu les rejoindre 10 ou 15 minutes plus tard. Il pleurait, disait que David était mort, selon le récit de Simon.

Ce soir-là, Rachid est rentré chez ses parents, tandis que les deux frères allaient coucher dans un motel, car ils n'osaient pas rentrer dans l'appartement de la rue Forest. Le lendemain matin, ils ont dû y aller pour chercher les effets personnels de Michel, car il se faisait évincer de son logement. En entrant, il n'y avait ni corps ni trace d'un quelconque incident. «Ça puait juste le chlore un peu», a expliqué Simon, hier.

Ils ont transporté les effets personnels de Michel chez leur frère aîné, qui demeurait tout près. En arrivant chez ce frère, ils ont constaté que Marseilles s'y trouvait, avec sa copine et son bébé de 1 an. Marseilles a pris Simon et Michel à part dans une chambre, et leur a dit de ne pas parler de ce qui s'était passé la veille. «Il a dit que David était mort la bouche ouverte, les yeux ouverts, et le front ouvert», a raconté Simon, hier. À ces mots terribles, la mère du jeune David, qui se trouvait dans la salle d'audience et qui n'a jamais revu le corps de son fils, n'a pu retenir ses sanglots.

Simon n'a jamais revu son copain David et n'a pas demandé à Marseilles pourquoi il avait «fait ça».

«À l'époque, je le craignais. Mais plus maintenant», a-t-il dit en fixant l'accusé, dans le box. Pour la même raison, parce qu'il avait peur, il n'a pas prévenu la police.

C'est Rachid qui est allé voir la police, le dimanche soir. Le procès se poursuit aujourd'hui, avec le contre-interrogatoire de Simon.

* Rachid, Simon et Michel sont des noms fictifs, car la Cour nous interdit de les identifier.