La seule présence des policiers identifiés à l'unité Eclipse suffit maintenant souvent, semble-t-il, à désamorcer des situations qui auraient pu s'avérer explosives, dans les secteurs chauds de Montréal.

Ce groupe spécial mis sur pied il y a un peu plus d'un an par le Service de police de la Ville de Montréal (SPVM) a notamment pour mandat d'assister les agents des différents postes de quartier dans leur lutte contre les gangs de rue. «On peut appuyer des actions des postes de quartier simplement en étant visibles», souligne en entrevue la commandante de l'unité, Natalia Shuster.

«Quand le groupe arrive, ç'a pour effet de calmer les esprits, ç'a pour effet, probablement, de prévenir certains actes, ajoute-t-elle. Les gangs de rue savent que nous avons une certaine expertise sur leur identité, sur leurs façons de faire, sur leur fonctionnement. Ca tranquillise et stabilise certaines situations.»

Quarante-quatre policiers en uniforme font partie d'Eclipse. Leur mandat touche surtout les gangs de rue et les crimes ponctuels.

À cela s'ajoutent 22 enquêteurs, analystes et autres, ce qui porte à 66 le nombre de membres de l'unité. Cette division d'enquête se penche davantage sur la cybercriminalité et le trafic de drogue.

Mais c'est bien le phénomène des gangs qui demeure la grande priorité de la commandante Shuster.

«Ce phénomène préoccupe et inquiète les citoyens, note-t-elle. Peu importe qu'on dise que la criminalité est à la baisse.»

Le nombre de crimes graves liés aux gangs de rue est effectivement en diminution. On leur a par exemple attribué huit meurtres l'année dernière contre 14 en 2007. Depuis janvier dernier, on a associé trois meurtres à ces gangs, soit deux de moins que pour la première moitié de 2008.

«C'est sûr que j'aime croire qu'on contribue (à cette baisse), mais ce n'est pas seulement à cause de nous, reconnaît Mme Shuster. Le Service met beaucoup de choses de l'avant pour contrer ce phénomène.»

Montréal compterait entre 300 et 500 membres de gangs importants.

L'affaire Villanueva

La mort du jeune Fredy Villanueva, survenue en août 2008, et les émeutes qui ont suivi constituent toujours une plaie ouverte, voire béante, chez les policiers comme chez les jeunes des minorités culturelles.

«Les événements de Montréal-Nord ont fait réfléchir beaucoup de gens, explique Natalia Shuster. Pas seulement les policiers du poste de quartier 39 (le poste local), mais l'organisation entière (du SPVM), les groupes communautaires, les différents paliers de gouvernement. Il a fallu que chacun se regarde dans le miroir pour se dire: «qu'est ce que je peux améliorer?'«

Bien que toute jeune, l'unité Eclipse a déjà dû modifier ses approches en tenant compte de cette réalité, notamment en essayant de comprendre les moeurs et façons de penser des résidents de chaque secteur de la ville.

«C'est en constante évaluation, dit sa commandante. Nous avons mis en place beaucoup de choses pour améliorer la communication, pour avoir plus d'information. C'est surtout ça qui est le nerf de la guerre. Chaque secteur est différent et on doit s'adapter aux particularités locales.»

«Les policiers de mon équipe suivent des cours sur les changements dans la société et sur les approches à privilégier avec les différentes communautés.»

De là à tomber dans le profilage racial, il n'y a qu'un pas, et le SPVM assure évidemment qu'il se garde bien de le franchir.

«C'est un comportement qui est incompatible avec nos valeurs, soutient Mme Shuster. On arrête les gens sur la base d'une infraction qui est commise ou d'un comportement suspect.»