Même s'il n'a pas été impliqué directement dans la collision qui a tué deux jeunes filles, le soir du 24 juillet 2005, à Montréal, Daniel Dupuis y a contribué en participant à une course avec le conducteur du véhicule dans lequel les victimes se trouvaient.

C'est la conclusion à laquelle est arrivé le juge Salvatore Mascia, mardi, en déclarant Daniel Dupuis, 37 ans, coupable de conduite dangereuse et de délit de fuite ayant fait deux morts et un blessé. «La cause primaire est le fait que deux personnes se sont engagées dans une course», a dit le juge.

Le drame s'est joué en environ une minute. Au volant d'une Crossfire décapotable, Dupuis, alors âgé de 33 ans, attendait à un feu rouge rue Dickson, pour tourner vers l'est, rue Notre-Dame. «T'as un beau char», lui a lancé un des jeunes qui se trouvaient dans une Hyundai Accent 1996, dans la voie de droite, attendant pour tourner à l'ouest. Quand le feu est devenu vert, plutôt que de tourner vers l'est comme il devait le faire, Dupuis a bifurqué vers l'ouest rue Notre-Dame, et a doublé la Hyundai à bonne vitesse. Frédéric Garneau, 18 ans, a relevé le défi et a pesé sur l'accélérateur lui aussi. La Hyundai se trouvait toujours derrière la Crossfire, mais les deux voitures ont filé à une vitesse évaluée entre 120 et 150 km/h rue Notre-Dame sur une distance de 1,6 km. À un certain moment, une fourgonnette a surgi devant la Hyundai, et la Crossfire a ralenti à la même hauteur. Garneau s'est faufilé entre les deux, mais ce faisant, il a perdu la maîtrise de son véhicule. Il a percuté un lampadaire et un arbre. Annie Lachapelle, 18 ans, et Mélissa Lalonde-Émard, 16 ans, assises à droite de la voiture, sont mortes, tandis que Garneau et un ami assis derrière lui n'ont été que légèrement blessés. Dupuis a, quant à lui, poursuivi sa route, sans s'arrêter. Les policiers l'ont arrêté environ neuf mois plus tard.

«Le petit jeune a fait le con»

Le jeune Garneau a plaidé coupable en novembre 2007, et a écopé de trois ans de prison. Dupuis, pour sa part, a toujours prétendu qu'il n'avait rien à voir « là-dedans » et que c'est le « petit jeune qui a fait le con avec sa Hyundai». Il reconnaissait avoir conduit un peu plus vite que la limite permise ce soir-là, mais soutenait qu'il ne s'était pas engagé dans une course. En ce qui concerne l'accusation de délit de fuite, il admettait avoir vu l'accident - «ça revolait partout» -, mais considérait qu'il n'avait pas à s'arrêter. Il s'était dit que le petit jeune n'avait qu'à «assumer». En fait, Dupuis s'est arrêté plus loin, mais c'était seulement pour vérifier si sa propre voiture était abîmée.

Depuis le début de cette affaire, Dupuis a eu une attitude insolente, allant même jusqu'à narguer des témoins et le père d'une des victimes par des sourires et des regards insistants. Par ailleurs, en juin dernier, comme il n'avait pas donné signe de vie depuis cinq mois, et que son procès devait commencer, les policiers se sont lancés à sa recherche et l'ont trouvé à Pointe-Calumet, chez ses grands-parents. Il n'avait pas fait son changement d'adresse et n'avait pas remis son permis de conduire comme il devait le faire, ce qui lui a valu des accusations de bris de conditions. Il est détenu depuis. Il passera au moins l'été en prison, puisque les représentations sur la peine à lui imposer ont été fixées au 3 septembre prochain.

Gilles Émard, le père d'une des victimes, est sorti soulagé de la salle d'audience, mardi. Pour lui, il est clair que c'est la course entre Garneau et Dupuis qui a causé la mort de sa fille, et il tenait à ce que ce soit reconnu. «Ça ne referme pas la plaie, mais ça met un baume», a-t-il dit.