L'avocate d'un Québécois, qui a survécu in extremis après s'être perdu pendant neuf jours dans l'arrière-pays de la Colombie-Britannique et qui a vu son épouse mourir dans la mésaventure, a dit être surprise par l'ampleur de l'animosité portée contre son client.

Des images truquées de Gilles Blackburn en clown se trouvent sur Internet, et des internautes lui profèrent des insultes et l'exhortent à ne plus jamais revenir en Colombie-Britannique.

Cela survient à la suite de la décision de M. Blackburn de poursuivre la Gendarmerie royale du Canada (GRC), le gouvernement provincial, une station de ski et l'équipe de recherche et de sauvetage de Golden, en Colombie-Britannique, alléguant qu'ils ont été négligents en ne répondant pas aux signaux de détresse que le skieur avait tracés dans la neige en février.

La poursuite a causé l'interruption des opérations de l'équipe de recherche et de sauvetage de Golden, et poussé des équipes à travers le pays à tenter de déterminer si elles sont assurées contre de telles actions en justice.

Mais l'avocate de M. Blackburn, Nancy Wilhelm-Morden, a soutenu que le public semblait avoir oublié qui était la victime dans cette affaire.

«Je crois qu'il est important que les gens se rappellent qui est poursuivi dans cette affaire et pourquoi, a fait valoir Me Wilhelm-Morden, en entrevue à La Presse Canadienne. L'équipe de recherche et de sauvetage de Golden et la GRC ont entendu les appels à l'aide (de M. Blackburn et de sa femme Marie-Josée Fortin) et ils n'ont rien fait.»

L'équipe de Golden a annoncé la semaine dernière la suspension de ses opérations après que M. Blackburn eut déposé deux poursuites contre elle, une en son nom, et l'autre au nom de ses enfants.

Gilles Blackburn réclame des dommages et intérêts après s'être perdu pendant neuf jours dans la nature avec sa femme en février.

Marie-Josée Fortin est morte d'hypothermie après sept jours.

Quand M. Blackburn a déposé sa poursuite, il a dit vouloir s'assurer que plus personne ne soit abandonné sans secours dans les bois.

Ironiquement, les équipes de recherche et de sauvetage à travers la Colombie-Britannique envisagent désormais de suspendre leurs opérations à cause de la poursuite.

Malgré tout, Me Wilhelm-Morden a dit ne pas croire que la poursuite et d'éventuelles fermetures allaient mettre les adeptes du plein air en plus grand danger. «La GRC est responsable de retrouver les personnes égarées. Quand les équipes de recherche et de sauvetage ne sont pas disponibles, (la GRC) fait appel à d'autres personnes», a-t-elle fait valoir.

En fait, l'avocate a soutenu que tous les gens concernés peuvent ressortir gagnants si des problèmes dans les opérations de secours sont mis en lumière grâce à la poursuite intentée par son client.

Le président de l'Association canadienne des volontaires en recherche et sauvetage (ACVRS) figure parmi ceux qui soutiennent que la poursuite pourrait avoir un fort effet d'entraînement à travers le pays, amenant 15 000 bénévoles à reconsidérer les risques de leur engagement.

Questionnée sur le risque que la poursuite force les équipes de recherche et de sauvetage à réévaluer le travail des bénévoles, Me Wilhelm-Morden a affirmé que «l'assurance responsabilité était là pour ça».

L'avocate a fait valoir la différence entre la négligence et une simple erreur. «Les erreurs surviennent. Il faut qu'il y ait négligence pour que quelqu'un soit responsable en fonction de la loi», a-t-elle expliqué.

En Colombie-Britannique, le gouvernement provincial se charge de l'assurance responsabilité pour les bénévoles, mais les sociétés de recherche et de sauvetage doivent y voir elles-mêmes. L'équipe de Golden a exprimé des craintes quant aux écarts dans les contrats d'assurance et sur le fait que l'assurance du gouvernement provincial n'est pas valide si une opération de recherche en bonne et due forme n'a pas été lancée.

En Colombie-Britannique, l'équipe de recherche et sauvetage de Kimberley a suivi les traces de celle de Golden en suspendant ses opérations pendant une semaine - avant de les reprendre - et l'équipe de la ville de Vernon a donné 60 jours au gouvernement provincial pour arriver avec des solutions avant qu'elle ne fasse de même.