Pour avoir aidé des trafiquants de la mafia à passer de la cocaïne en contrebande à l'aéroport Montréal-Trudeau, la douanière Nancy Cedeno fait face en Cour du Québec à huit chefs d'accusation d'importation de drogue, de gangstérisme et de corruption.

À l'ouverture de son procès avec quatre autres accusés, la femme de 34 ans était prête à reconnaître sa culpabilité à une seule de ces accusations, soit «d'avoir illégalement par corruption facilité la commission d'un crime», mais la poursuite s'est montrée intraitable. Avec l'assentiment du juge Claude Millette, elle a reporté son plaidoyer à la fin du procès.

 

Dans son exposé, Me Alexandre Dalmau, de la poursuite, a déclaré qu'il entendait faire la preuve que Nancy Cedeno avait participé à trois complots d'importation de cocaïne entre août 2005 et mai 2006. L'un s'est traduit par une saisie de neuf kilos en Haïti, un autre a échoué, tandis que l'issue du troisième demeure toujours un mystère pour les policiers.

Des déclarations douanières pré-estampillées

En poste à l'aéroport Montréal-Trudeau, Cedeno validait à l'avance les cartes de déclaration douanière estampillées et codifiées qui permettaient aux courriers de traverser la frontière sans encombre à leur arrivée à Montréal.

En vue de démontrer qu'elle travaillait pour une organisation criminelle, Me Dalmau prévoit mettre en parallèle la constance avec laquelle ses deux principaux leaders, Giuseppe Torre et Ray Kahno, faisaient entrer de la cocaïne à Montréal, par le truchement de leurs nombreux contacts à l'aéroport. Les trafiquants qui utilisaient cette porte d'entrée devaient payer une «taxe» au clan Rizzuto.

Avant le début du procès hier, Omar Riahi, qui a présenté Cedeno aux mafieux, a reconnu l'avoir soudoyée à l'occasion de ces trafics. Âgé de 33 ans, Riahi avait connu la douanière lors d'un stage qu'il a fait à Douanes Canada. Au moment de son arrestation en novembre 2006, il travaillait pour l'armée canadienne, à Halifax.

Me Dalmau a indiqué au juge Millette qu'il allait demander 10 ans de pénitencier dans le cas de Riahi. Les plaidoiries sur la sentence ont été reportées au 8 septembre. En attendant, l'accusé demeure en liberté.

À l'instar de Riahi, un autre accusé, Jean-Michel Réacarld, 41 ans, a coupé court aux poursuites intentées contre lui en annonçant qu'il désirait lui aussi plaider coupable. Il reviendra devant le tribunal aujourd'hui pour enregistrer son plaidoyer. Il s'était rendu en Haïti livrer les cartes de douane pré-estampillées que les courriers devaient utiliser pour faciliter l'entrée de la drogue à Montréal, à l'automne 2005. Le projet ne s'est pas réalisé, l'un des courriers ayant été arrêté lors de son embarquement, à l'aéroport de Port-au-Prince. En fouillant ses valises, les douaniers haïtiens ont trouvé neuf kilos de cocaïne.

Outre la douanière Nancy Cedeno, seuls deux autres accusés doivent encore avoir leur procès; il s'agi de Julie Châteauneuf-Fleury, 27 ans, et de Jean-Marie Fritz Balmir, 38 ans, soupçonnés d'être des courriers pour le compte de Giuseppe Torre et Ray Kahno.

L'essentiel de la preuve repose sur l'écoute électronique et les enquêtes de filature. Le ministère public fera entendre 750 conversations téléphoniques. Le procès devrait durer deux à trois semaines.