Saïd Namouh ne témoignera pas pour sa défense dans son procès pour terrorisme. Son avocat va plutôt tenter de faire déclarer «inconstitutionnelle» la loi antiterroriste, adoptée dans la foulée du 11 septembre 2001.

C'est la carte que Me Duval a abattue, hier, après que la Couronne eut terminé sa preuve, au procès de Namouh. Ce Marocain d'origine, qui a obtenu sa résidence permanente en 2003 après avoir épousé une Québécoise, est accusé de complot à l'engin explosif, participation aux activités d'un groupe terroriste, facilitation d'activités terroristes et extorsion en association avec un groupe terroriste. Les trois dernières accusations relèvent de l'article 83 du Code criminel, ayant trait au terrorisme. Or, Me Duval allègue que cet article et ses alinéas contreviennent à la Charte des libertés.

 

«C'est contraire à la liberté d'expression et de religion. Ma prétention est que ce que Namouh a fait est protégé par son droit à la liberté religieuse et à la liberté d'expression», a expliqué Me Duval, en sortant de la salle d'audience, hier.

Combat ardu

Le combat de Me Duval s'annonce bien ardu. Certes, c'est la première fois au Québec qu'un procès pour terrorisme est tenu en vertu de cette loi. Mais l'article 83 a été éprouvé. «Les articles en matière de terrorisme ont été utilisés ailleurs au Canada, notamment dans l'affaire Khawaja, qui est en attente de sentence», a indiqué le procureur de la Couronne fédérale, Dominique Dudemaine. En octobre dernier, à Ottawa, Momin Khawaja a été déclaré coupable d'avoir financé et facilité les activités terroristes.

Dans le cas présent, Me Dudemaine semblait fort satisfait du déroulement du procès à venir jusqu'ici. «On a réussi à mettre en preuve tous les éléments dont on disposait. Aucun n'a été écarté. Le juge aura à décider sur l'ensemble de la preuve.»

La preuve utilisée contre Namouh repose principalement sur des discussions sur l'internet démontrant son intérêt pour le jihad, et des films qu'il a montés ou diffusés sur l'internet pour le Global Islamic Media Front, qui fait la promotion de l'Armée de l'islam. Les films présentent des attaques réelles et meurtrières contre les soldats américains en Irak. On y voit aussi des attentats suicide, la manière de fabriquer des ceintures explosives, l'endroit où se placer dans un autobus pour se faire exploser en tuant le plus de personnes possible. Toutes ces images sont cependant disponibles sur l'internet.

L'une des grandes questions que le juge Claude Leblond devra trancher est justement de décider si le GIMF est en lui-même un groupe terroriste. «Même si le tribunal en vient à la conclusion que le GIMF n'est pas un groupe terroriste, il y a moyen de le trouver coupable d'avoir participé à un groupe terroriste, soit Al-Qaeda», est d'avis Me Dudemaine.

Le procès de celui qui a été surnommé le «terroriste de Maskinongé» lors de son arrestation en septembre 2007, reprendra au début d'avril, avec l'audition de la requête de la défense.