Un haltérophile qui a déjà participé aux Jeux olympiques est à la tête d'une des cellules démantelées hier, au cours de la frappe policière d'envergure qui a secoué la métropole. Jean Lavertue et ses trois frères étaient de nouveaux noms dans le gotha de l'entourage des Hells Angels et de l'univers de la drogue.

Jean Lavertue, 34 ans, a reçu la visite des policiers chez lui, à Pointe-Claire, dans l'ouest de Montréal. Même chose pour ses trois frères, Patrick, 31 ans, Martin, 41 ans et Stéphane, 34 ans. Deux d'entre eux habitent le même quartier que lui.

 

On reproche aux Lavertue leur implication dans le trafic des stupéfiants, entre le 1er août 2005 et hier.

Les frères Lavertue formaient une cellule dans le sud-ouest de la métropole et travaillaient loin des projecteurs. Leur rôle était d'approvisionner en cocaïne les frères Zephir, associés aux Syndicate, qui servaient à leur tour de pivot entre les gangs de rue et les motards (voir autre texte). Ils étaient responsables de la distribution de plusieurs kilos de cocaïne chaque semaine, ce qui leur rapportait entre 400 000$ et 500 000$.

Malgré leur discrétion, les Lavertue étaient dans la ligne de mire des policiers depuis 2001. Jean Lavertue, un haltérophile de 34 ans, a déjà pris part à plusieurs compétitions d'envergure dans cette discipline, en plus d'avoir représenté le Canada aux Jeux olympiques d'Atlanta en 1996. Il est propriétaire depuis quelques années d'un centre de conditionnement physique à Verdun, où des perquisitions ont aussi été menées durant une bonne partie de la journée.

À l'aube

Les premières lueurs du jour pointaient à l'horizon lorsqu'une demi-douzaine de voitures de police banalisées ont fait irruption rue Marsh, où l'ex-olympien habite dans un bungalow assez cossu flanqué d'un garage.

Quelques minutes plus tard, un des enquêteurs est ressorti de l'endroit, un talkie-walkie entre les mains. «Tout est sous contrôle, on l'a!» a-t-il lancé.

Pendant qu'un autobus d'écoliers passait devant la porte, Jean Lavertue sortait de sa maison sous une escorte policière, les menottes aux poignets. Le prévenu, complètement vêtu de noir, avait l'air très calme lorsqu'il est monté dans le véhicule des enquêteurs.

Les policiers ont ensuite fait des perquisitions dans la maison et le garage. Un des deux véhicules du suspect a été fouillé de fond en comble.

Près de là, avenue Saint-Louis, les policiers ont frappé chez Patrick Lavertue, le frère cadet de l'haltérophile. Après son arrestation, plusieurs policiers ont fouillé l'intérieur de la maison. Dans l'entrée du bungalow, un agent portait un manteau de l'escouade des gangs de rue.

Informé des événements, un voisin n'en revenait tout simplement pas. «Je ne peux pas y croire. C'est un gars très très très gentil. Il habite ici depuis quelques années et travaille dans la construction. Je suis très surpris. Je pensais qu'il avait été victime d'un vol», a raconté ce voisin, sous le couvert de l'anonymat.

Saisies au gym

Les policiers ont passé plusieurs heures au Gym Expert, propriété de Jean Lavertue et situé avenue Verdun, dans l'arrondissement du même nom. Ils y ont saisi plusieurs choses, dont un ordinateur et des documents.

À leur départ, vers 13h30, le centre de conditionnement physique et le salon de coiffure situé dans le même bâtiment ont aussitôt rouvert leurs portes. Plusieurs clients, qui attendaient la réouverture des commerces, se sont précipités à l'intérieur. Tous ont dit ne rien connaître des agissements du propriétaire du gym. «Pas de commentaire», a sèchement laissé tomber un responsable de l'endroit, avant d'expulser le représentant de La Presse.

Un client régulier rencontré à l'extérieur n'avait rien à redire contre le propriétaire, surnommé Johnny. Jean Lavertue possède peu d'antécédents judiciaires. En 1993, il a plaidé coupable à une accusation de voies de fait avec lésions.

Les Lavertue devraient, entre autres, être accusés de complot pour faire le trafic de stupéfiants, trafic et gangstérisme.