Une simple visite dans les universités de Montréal permet de noter l'ampleur des rénovations à effecteur. Ici, des escaliers de pierre tremblent au passage des étudiants. Là, un mur risque de s'effondrer. Et là, des poubelles recueillent l'eau d'un plafond qui fuit depuis deux ans. Mais vu l'énorme fardeau financier que représentent ces travaux, les universités doivent chaque année se contenter de parer au plus urgent.

La situation est particulièrement critique à l'Université McGill. Les quelque 150 immeubles de l'institution ont jusqu'à 200 ans d'âge. «Ça coûte très cher à entretenir et il y a toujours quelque chose à faire», confie le directeur général de la gestion des immeubles, Ron Proulx.

 

Cette année, M. Proulx, a choisi de remplacer les 1000 fenêtres du pavillon de dentisterie. Le coût de l'opération est important, principalement parce que l'Université devra mettre des fenêtres ayant l'apparence des originales. «Depuis un peu plus d'un an, la Ville nous oblige à toujours rénover en respectant l'aspect d'origine, explique M. Proulx. C'est très coûteux.»

Par exemple, alors que construire un escalier en béton coûte environ 80$ le pied cube, McGill doit refaire ses escaliers en pierre, qui coûtent jusqu'à 200$ le pied cube. Et le campus compte des dizaines de ces escaliers.

Plusieurs des toits de l'Université McGill sont aussi faits d'ardoise. Alors que des toits traditionnels pour ce type de bâtiment coûtent environ 15$ le pied carré, l'ardoise coûte 150$. «On est toujours en discussion avec la Ville pour essayer de trouver des compromis afin d'entretenir nos structures en respectant le patrimoine tout en évitant les coûts astronomiques», commente M. Proulx.

Pendant ce temps, il a fallu condamner un pavillon de McGill parce qu'un mur risque de s'effondrer. Près de la faculté de droit, une immense terrasse de béton est si gondolée qu'il faut la refaire. «On a toujours des choses à réparer. Mais on n'a pas l'argent pour tout faire. Il faut faire des choix», commente M. Proulx.

Depuis que Québec a lancé une série de chantiers de construction pour relancer l'économie, les entrepreneurs de la province sont en demande. Ils ont augmenté leurs tarifs. Les universités en subissent les effets. «Quand les gars de fondation et de béton acceptent de venir ici, ils demandent beaucoup plus cher, note M. Proulx. On a un peu moins de latitude à cause de ça.»

Solution? Poubelles!

À l'Université de Montréal, des travaux sont actuellement en cours pour rénover 14 salles de classe dans le pavillon Jean-Brillant. Autant de salles de toilettes ont récemment été rénovées, pour 1,3 millions. «Quand le pavillon a été bâti, dans les années 60, il y avait plus de garçons que de filles à l'université. Plus maintenant. Il a fallu revoir la configuration des toilettes», explique la directrice des relations médias de l'Université de Montréal, Sophie Langlois.

Mais ces quelques rénovations ne sont qu'une goutte d'eau dans l'océan d'infrastructures à réparer à l'Université de Montréal. En se promenant dans les corridors, on remarque que plusieurs endroits sont défraîchis. Dans le passage qui relie le pavillon Jean-Brillant au pavillon Roger-Gaudry, deux poubelles recueillent l'eau qui coule du plafond. «Elles sont là depuis deux ans. Les concierges ont même mis des grilles sur les poubelles parce qu'ils étaient tannés que les gens y jettent des déchets!» remarque le secrétaire général de la Fédération des associations étudiantes du campus de l'Université de Montréal (FAECUM), Nicolas Descroix.

Dans l'aile du département de physique, certains laboratoires ont besoin de restauration. Deux appareils analytiques neufs, toujours emballés, sont entreposés dans le corridor. «On ne peut pas les mettre dans les laboratoires, qui ne sont pas encore configurés pour les accueillir», affirme M. Descroix.

La liste de travaux à entreprendre est longue. Et comme si ce n'était pas assez, l'Université de Montréal doit aussi décontaminer certains de ses murs, qui contiennent de l'amiante.

À l'École polytechnique, c'est plutôt le système de chauffage et de ventilation qui cause des maux de tête.

Dans la centrale thermique de l'école, trois immenses chaudières bleues alimentent un système de chauffage à la vapeur. Les trois chaudières n'ont jamais été remplacées depuis la construction du bâtiment principal... en 1957.

L'École polytechnique effectue des rénovations sur une base régulière. Mais dans certains secteurs, l'établissement sera bientôt «à un point critique», dit la porte-parole de l'établissement, Annie Touchette. «Les besoins et les normes changent, et il faut s'y adapter», explique le responsable du secteur énergie de Polytechnique, Michel Lareau.

Plusieurs salles de classe ne sont toujours pas climatisées. «Avec les ordinateurs, aujourd'hui, ça n'a plus de sens», croit M. Lareau.

Le nouveau pavillon Lassonde de l'École polytechnique, construit en 2005, est lui aussi alimenté par la centrale thermique du pavillon principal. Un système sophistiqué de collecte de la chaleur a été mis en place, augmentant du coup le rendement énergétique du nouveau bâtiment. Mais si un pépin survient dans les chaudières d'origine, c'est toute l'école qui en subirait les conséquences.

Les universités montréalaises ont beaucoup à faire pour remettre leurs installations en état. «Et à travers tout ça, on doit aussi penser à des agrandissements parce que notre clientèle augmente», affirme Mme Touchette.