Pour concurrencer le privé et attirer l'élite, la commission scolaire Marguerite-Bourgeoys veut transformer l'école secondaire Mont-Royal en école internationale. Déjà, 51 élèves y ont été refusés en première secondaire cette année (seuls des groupes d'éducation internationale ont été ouverts) et aucun ne sera admis en première et en deuxième année l'an prochain, a appris La Presse.

Michelle Courchesne, la ministre de l'Éducation, n'a pourtant pas encore approuvé le changement de statut de l'établissement, qui soulève la controverse. «La demande est présentement en traitement et aucune décision n'est encore prise», a dit Pierre Noël, porte-parole du ministère de l'Éducation, qui a reçu la requête fin avril. Comité de parents et syndicat d'enseignants s'opposent au projet, qui écarte les élèves plus faibles ou incapables de payer de 550 $ à 750 $ en frais annuels.

Cinquante pour cent des élèves de l'école secondaire Mont-Royal sont nés hors du Canada, et la plupart n'habite pas à Mont-Royal. Jusqu'à cette année, quatre programmes leur étaient offerts : le régulier, l'éducation internationale, les classes avec appui (pour élèves en difficulté) et l'accueil (pour les immigrés récents).

C'était une réussite: «Le taux de décrochage scolaire à l'école secondaire Mont-Royal, même dans les classes ordinaires ou de mesures d'appui, est nettement plus faible que dans les autres écoles de milieu socioéconomique comparable», lit-on dans un document adopté par le conseil d'établissement le 4 février dernier.

Mieux desservir Mont-Royal

«L'école a décidé de se recentrer et de desservir les gens de Mont-Royal, a expliqué Brigitte Gauvreau, porte-parole de la commission scolaire Marguerite-Bourgeoys. Dans le désir de mettre en place une école vouée à l'éducation internationale, il y a aussi le désir de desservir la communauté de Mont-Royal.»

C'est pour cette raison qu'il n'y a que des classes internationales en première secondaire cette année : des 51 candidatures au secteur régulier, à peine cinq élèves venaient de Mont-Royal, a précisé Mme Gauvreau. «Ce n'est pas assez pour ouvrir une classe», a-t-elle dit. Le scénario va sûrement se répéter l'an prochain, si bien que le régulier ne sera plus offert que de la troisième à la cinquième année. «Une école ne peut pas refuser des élèves réguliers avant d'avoir obtenu son statut d'école particulière», a pourtant affirmé M. Noël.

Les élèves réguliers ou faibles qui sont déjà à Mont-Royal pourront y rester jusqu'à la fin de leur secondaire «en autant que les services offerts» correspondent à leurs besoins, lit-on dans un autre document adopté par le conseil d'établissement. Or, la baisse du nombre d'élèves (liée à la fermeture du programme régulier, disent les opposants au projet) a entraîné un déficit de 140 000 $. Des postes ont dû être supprimés.

Selon les prévisions obtenues par La Presse, en devenant une école entièrement internationale, Mont-Royal ira chercher 48,2 % de ses élèves parmi ceux de l'école Saint-Laurent, 42,1 % au privé et le reste dans d'autres écoles publiques des alentours. Pour être sélectionnés, les élèves devront réussir un examen d'admission et n'avoir aucun problème de comportement.

Seul un tiers des parents favorables

À l'unanimité, le Comité central des parents de Marguerite-Bourgeoys s'est opposé au projet, le 30 avril. «Nous avons l'obligation de représenter l'ensemble des parents, et seul un tiers sont favorables», a expliqué Jocelyne Bénard, présidente du comité. Seulement 247 parents de l'école (de 760 élèves) ont signé la lettre d'appui au changement de vocation. Le Syndicat de l'enseignement de l'Ouest de Montréal s'est aussi «prononcé en défaveur», a dit Andrée Aubut, sa présidente.

Quant aux enseignants, ils sont partagés. Certains jugent le projet élitiste, discriminatoire et cavalier, tandis que d'autres y voient la possibilité d'offrir de l'excellence dans le secteur public et de concurrencer le privé.

Le conseil des commissaires de Marguerite-Bourgeoys se prononcera à nouveau sur le projet le 29 juin, a indiqué Mme Gauvreau. Déjà, le 10 mars dernier, le conseil avait adopté un «avis d'intention» demandant à la ministre Courchesne d'approuver la transformation de Mont-Royal en école internationale à partir «du 1er juillet 2009».