Quelques centaines d'enseignants, d'employés de soutien et d'étudiants en grève sont descendus dans la rue pour réclamer un financement public adéquat pour l'UQAM. Un enlisement du conflit pourrait mettre le semestre en péril, prévient le syndicat des professeurs.

« On ne le souhaite pas, mais très peu de cours sont donnés pour le moment et plusieurs chargés de cours et étudiants refusent de franchir les piquets de grève «, a expliqué la présidente du syndicat des enseignants, Michèle Nevert. Les employés en grève ont reçu une proposition de l'employeur, qui sera évaluée aujourd'hui au cours d'une assemblée générale. Mme Nevert n'a pas voulu en dévoiler la teneur avant d'en discuter avec ses membres.

 

L'UQAM confirme de son côté le dépôt d'une offre patronale mercredi soir, mais se garde d'en dévoiler les détails jusqu'à l'assemblée générale des syndiqués prévue ce matin. « Cette offre touche les salaires, l'embauche de nouveaux profs et la création d'un comité qui va se pencher sur l'organisation du travail «, a résumé le porte-parole de l'université, Daniel Hébert.

À l'heure actuelle, les activités de l'université ne sont pas paralysées complètement, puisque les chargés de cours tentent de maintenir les classes. Mais les perturbations ont néanmoins forcé la direction de l'UQAM à suspendre les cours mercredi et hier, dans les pavillons du centre-ville. « Afin d'assurer la sécurité des personnes et d'éviter les confrontations «, justifie la direction dans un communiqué.

Selon Daniel Hébert, l'UQAM est littéralement paralysée depuis deux jours par la grève des enseignants. Des piquets de grève qualifiés de « très serrés « expliquent en partie l'annulation des cours, qui devraient reprendre normalement ce matin. Une plainte a d'ailleurs été déposée à la police de Montréal par une étudiante apparemment prise à partie mercredi par des grévistes. « La ligne de piquetage était alors plus hermétique, il y a eu des engueulades et de la bousculade «, a souligné M. Hébert.

Les manifestants rassemblés hier réclament l'équité salariale avec les autres institutions universitaires canadiennes et l'embauche de 300 nouveaux enseignants. Les 980 professeurs de l'UQAM demandent un rattrapage salarial de 11,6% sur trois ans. Grâce au climat printanier, les participants étaient nombreux, armés de pancartes, de trompettes et de gazous.

Les professeurs ont décrété une semaine de grève dans l'espoir de ramener la direction à la table de négociations. Cette dernière attendait d'abord la remise d'une étude de la firme Aon portant sur les conditions de travail dans l'ensemble des universités québécoises avant de se prononcer.

Des étudiants solidaires des facultés des sciences humaines et des arts ont quant à eux voté des journées de grève « flottantes «, pour unir leurs voix à celles des employés de l'UQAM. Par courriel, d'autres étudiants ont dit se sentir plutôt pris en otages par le conflit en cours.

La convention collective des enseignants est échue depuis 2007. « La grève est le seul moyen de faire pression. Les étudiants comprennent et partagent nos revendications, ils souffrent aussi du manque d'enseignants «, a souligné Gaby Hsab, gréviste et professeur.

Le cortège, gonflé à bloc, a convergé vers les bureaux montréalais de Jean Charest, rue McGill College. Des percussionnistes ont ouvert la marche des manifestants. « On veut des emplois de qualité, on est tannés d'être surchargés! «, « L'UQAM, c'est qui? C'est nous! « scandaient les manifestants. « Le syndicat des professeurs n'est pas en train de faire des demandes à l'administration, il est en rattrapage «, a nuancé l'illustre syndicaliste Gérald Larose, aussi enseignant en travail social.

Un des porte-parole du mouvement a pour sa part dénoncé la « mcdonaldisation de l'enseignement supérieur «. « Nos diplômes ne sont pas des papiers commerciaux, on dit non à la privatisation de l'UQAM, non au coup d'État! « a martelé Roland Côté, le président du syndicat des employés de soutien. « On pense que la communauté de l'UQAM ne doit pas faire les frais des dérives immobilières de l'institution «, a indiqué pour sa part le président du Syndicat des employés étudiants, Éric Demers, faisant référence au fiasco de l'îlot Voyageur. « On est en train de démolir un des bijoux de la Révolution tranquille «, a ajouté M. Demers.

Pour les étudiants rencontrés, le réinvestissement dans l'université est crucial et urgent. « Sinon, on aura du mal à attirer des nouveaux professeurs compétents «, croit Jérôme Baril, un étudiant en arts.