Le versement des paies de vacances serait-il compromis? C'est ce que le conflit de travail à la Commission de la construction du Québec (CCQ) fait craindre à certains acteurs de l'industrie de la construction.

Mercredi soir, la direction de la CCQ a décrété un lock-out de 48 heures visant les 600 employés de bureau de l'organisme. Par ce lock-out, elle dit vouloir inciter le syndicat à négocier. En matinée, le Syndicat des employés professionnels et de bureau (SEPB) a menacé de déclencher une grève générale illimitée à défaut d'une entente d'ici à dimanche.

Les deux camps dirigés par la présidente Diane Lemieux et le directeur exécutif du SEPB Serge Cadieux sont aux antipodes. Or, ce fossé laisse craindre le prolongement du conflit et des conséquences sur les 170 000 travailleurs de l'industrie au Québec.

Pas d'inquiétudes à la CCQ

«Les gens commencent à se poser sérieusement la question: qu'arrivera-t-il avec les payes de vacances?», a dit Jean-Marc Simard, directeur des relations de travail de Pomerleau, l'une des principales firmes de construction du Québec.

Les 600 employés en lock-out sont responsables de gérer le régime d'assurances collectives des travailleurs de l'industrie, de même que les quatre grandes conventions collectives, entre autres.

Normalement, les paies de vacances sont produites par la CCQ vers le 22 juin. Elles concernent les vacances annuelles de la construction, qui se déroulent cette année du 22 juillet au 4 août.

Le porte-parole de la CCQ, Louis-Pascal Cyr, assure que le versement des paies de vacances n'est pas à risque. «Les calculs sont déjà faits. Il ne reste que l'impression des chèques et l'envoi», dit-il.

Selon M. Cyr, l'impression des 170 000 chèques ne nécessite que deux employés et l'envoi de masse est fait par une firme sous-traitante. «J'ai zéro doute», dit-il.

Le lock-out ou la grève concerne 600 des 900 employés syndiqués de la CCQ. Les 300 autres sont les employés investis d'un pouvoir d'enquête. La CCQ compte également une centaine d'employés non syndiqués, essentiellement

des cadres.

Par ailleurs, le conflit perturbe un autre volet de la CCQ: la formation et la délivrance des «cartes de compétence». En 2011, la CCQ a remis quelque 29 000 certificats de compétence aux apprentis, compagnons et manoeuvres, en plus de faire passer des examens à 11 400 personnes. Le conflit perturbe grandement ce volet de la CCQ, qui occupe

environ 200 des 600 employés en grève. Hier, un électricien apprenti de la banlieue sud de Montréal a expliqué à La Presse être incapable de faire son examen pour obtenir son statut de compagnon en raison du conflit. Il avait fait les 8000 heures de travail exigées pour devenir compagnon.

Dans l'attente de son certificat de compagnon, il gagne 29$ l'heure plutôt que 34$, un manque à gagner d'environ 200$ par semaine. «C'est une grosse perte», dit l'électricien, qui connaît d'autres collègues dans la même situation.

Certificats de compétence

Jean-Marc Simard, de Pomerleau, voit lui aussi son entreprise perturbée par la question des certificats de compétence. Le travail régulier sur les chantiers n'est cependant pas touché pour le moment, dit-il.

En plus de la formation, la CCQ gère le scrutin d'accréditation syndicale des employés, qui se fait par la poste et «qui peut être réalisé sans personnel syndiqué», soutient Louis-Pascal Cyr.

Rappelons que le régime de retraite est l'enjeu central des négociations. Le déficit de solvabilité du régime s'élèverait à 140 millions de dollars, selon la direction de la CCQ. Diane Lemieux veut réduire la masse salariale pour combler une partie du déficit.

La semaine dernière, elle a déposé une offre «globale et finale» qui propose une augmentation de 5% sur cinq ans. En comparaison, les employés du secteur public du Québec ont obtenu une hausse de 7% sur cinq ans.

Le salaire des employés de la CCQ est toutefois financé par les travailleurs et les employeurs de l'industrie, tandis que la fonction publique est rémunérée à même les impôts des contribuables. Hier, Serge Cadieux, du SEPB, n'a pas voulu faire de commentaires.