L'exaspération du gouvernement Legault envers l'opposition libérale a monté d'un cran mercredi, autour du projet de loi 1 portant sur les nominations.

Des deux côtés de la Chambre, le climat s'envenime un peu plus chaque jour, alors que la session parlementaire ne fait que commencer.

Lors d'une mêlée de presse, la ministre de la Sécurité publique, Geneviève Guilbault, qui pilote le projet de loi 1, n'a pas caché son agacement devant la volonté des libéraux de scinder son projet de loi, une hérésie à ses yeux.

Elle y voit le reflet d'une attitude générale des membres de l'opposition officielle libérale visant à paralyser les travaux parlementaires, attitude qu'elle dénonce.

Piquée au vif par les présumées « techniques » d'obstruction libérales, la ministre accuse l'équipe de Pierre Arcand de mauvaise foi et d'arrogance.

« Je sens de la part du Parti libéral, je ne dirais pas de l'agressivité, cette volonté d'opposition, a-t-elle mentionné. S'opposer pour s'opposer, je sens ça chez eux. »

Le même type de clivage entre libéraux et caquistes a été observable ces dernières semaines lors de l'étude du projet de loi 2 sur le cannabis et du projet de loi 9 sur l'immigration.

Rigidité caquiste

De leur côté, d'un projet de loi à l'autre, les libéraux constatent et déplorent la « rigidité » des membres du gouvernement qui cherchent à « imposer » leurs positions à tout prix, sans tenir compte des partis d'opposition, a commenté le leader parlementaire de l'opposition officielle, Sébastien Proulx, lors d'un entretien téléphonique.

Il estime que le gouvernement n'a montré aucune flexibilité lors de l'étude du projet de loi sur le cannabis et celle sur l'immigration. Et il se demande si le gouvernement va adopter la même attitude lors de l'étude du projet de loi à venir sur la laïcité et les signes religieux.

« C'est un gouvernement pressé, qui n'aime pas consulter », a résumé M. Proulx, qui juge fondée la position de sa formation, basée sur la séparation des principes en jeu dans le projet de loi 1.

Selon Mme Guilbault, cette pièce législative devrait faire l'unanimité, d'autant plus qu'elle accorde davantage de pouvoirs aux parlementaires.

Le projet de loi 1 - le premier déposé par le gouvernement Legault - vise à soustraire à toute partisanerie la nomination de trois postes-clés de l'administration publique : le directeur de l'Unité permanente anticorruption (UPAC), le directeur général de la Sûreté du Québec (SQ) et le directeur des poursuites criminelles et pénales (DPCP).

C'est une motion déposée en Chambre mercredi matin par le député libéral Gregory Kelley qui a mis le feu aux poudres. Pour bien distinguer le processus judiciaire de la gouverne policière, elle stipule que le gouvernement devrait scinder son projet de loi en deux : le premier viserait la SQ et l'UPAC, tandis que le second porterait sur le DPCP.

Mme Guilbault n'en démord pas : en réclamant ce changement, les libéraux font la preuve de « leur volonté très claire » de « paralyser le cheminement du projet de loi », ce que réfute M. Proulx, affirmant que la position de son groupe ne peut être assimilée à une mesure dilatoire.

Actuellement, le choix des personnes occupant ces fonctions relève du conseil exécutif. Une fois le projet de loi adopté, les titulaires de ces trois postes devront être nommés par les parlementaires des différents partis, aux deux tiers des membres de l'assemblée.

Mme Guilbault a fait valoir que la loi devait être adoptée pour qu'elle puisse nommer, d'ici l'automne, le successeur du commissaire de l'UPAC, Robert Lafrenière, qui a démissionné le 1er octobre dernier.

Le gouvernement renonce cependant à soumettre le chef du Service de police de la Ville de Montréal (SPVM) à une nomination aux deux tiers, car sa nomination est encadrée par la Charte de la Ville de Montréal.

Actuellement, les organismes désignés par un vote aux deux tiers de l'Assemblée nationale sont le Commissaire à l'éthique et à la déontologie, le Commissaire au lobbyisme, le Commissaire à l'intégrité des marchés, le Directeur général des élections, le Protecteur du citoyen, le comité de surveillance de l'UPAC et le Vérificateur général du Québec.

Les membres de la Commission d'accès à l'information, de la Commission de la fonction publique et de la Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse sont aussi nommés selon ce même vote.