Le gouvernement Legault compte sur Ottawa pour lui redonner le pouvoir « d'imposer des conditions » aux immigrants arrivant sur son territoire - comme la connaissance du français - pour l'obtention de leur statut de résidence permanente octroyé par le fédéral.

Le ministre de l'Immigration du Québec, Simon Jolin-Barrette, a déposé jeudi le projet de loi no. 9 « visant à accroître la prospérité socio-économique du Québec et à répondre adéquatement aux besoins du marché du travail pour une intégration réussie des personnes immigrantes ».  

Ce projet de loi décrète que « lorsque le ministre sélectionne un ressortissant étranger, il peut lui imposer des conditions qui affectent la résidence permanente conférée en vertu de la Loi sur l'immigration [fédérale] afin d'assurer, notamment [...] la satisfaction des besoins régionaux ou sectoriels de main-d'oeuvre [...] ou l'intégration linguistique, sociale ou économique du ressortissant étranger ».  

Or, pour ce faire, le gouvernement de Justin Trudeau doit modifier les règlements de sa propre loi sur l'immigration pour donner à Québec ce pouvoir. Selon M. Jolin-Barrette, la province avait cette capacité d'action jusqu'à la plus récente réforme libérale sur l'immigration datant du gouvernement libéral de Philippe Couillard.

À terme, si le fédéral accède à la demande de Québec, le gouvernement Legault souhaite notamment imposer la réussite d'un test de français et d'un test des connaissances des valeurs québécoises comme conditions, entre autres, au statut de résident permanent d'une personne immigrante.  

« Actuellement, il y a trop d'immigrants qui ne répondent pas aux besoins du marché du travail au Québec et il y a trop d'immigrants qui ne parlent pas français. [...] D'exiger la réussite d'un test de français, je pense qu'on se retrouve avec le meilleur des deux mondes. Les gens arrivent, [...] ils viennent ici, ils reçoivent des cours [de francisation] gratuitement et ils ont trois ans pour réussir un test de français (et un test de valeurs). C'est le meilleur parcours », a dit jeudi en mêlée de presse le premier ministre du Québec, François Legault.  

18 000 dossiers annulés 

Québec met aussi fin avec le projet de loi no. 9 à « toute demande [d'immigration] présentée [...] dans le cadre du Programme régulier des travailleurs qualifiés avant le 2 août 2018 ». Le ministère de l'Immigration avait accumulé plus de 18 000 dossiers non traités depuis des années.

Le ministre Simon Jolin-Barrette affirmait récemment que certains de ces 18 000 dossiers de candidatures s'étaient accumulés à son ministère depuis plus de dix ans. Cette situation compliquait notamment son travail pour accélérer la mise en oeuvre de son nouveau plan en immigration.  

Québec remboursera donc les droits payés par les quelque 18 000 demandeurs d'immigration pour ceux dont aucune décision de sélection n'était prise. Les personnes qui souhaitent toujours immigrer au Québec devront alors soumettre une déclaration d'intérêt auprès du ministère de l'Immigration, qui invitera à l'avenir ceux dont le profil économique correspond aux besoins du marché du travail au Québec pour qu'eux seuls entament le processus officiel d'immigration.  

Pour s'établir au Québec avec le Programme régulier des travailleurs qualifiés, un immigrant devra donc à l'avenir signaler son intérêt au ministère de l'Immigration, être invité à faire une demande d'immigration formelle, payer les droits exigés et voir son dossier examiné avant d'obtenir en fin de parcours son certificat de sélection du Québec (CSQ). Ce certificat est nécessaire pour appliquer auprès d'Ottawa afin d'obtenir la résidence permanente permettant de venir s'établir au Québec.  

Avec les nouvelles dispositions incluses dans le projet de loi du ministre Jolin-Barrette, Québec souhaite retrouver le pouvoir d'inclure des conditions (comme la connaissance du français et des valeurs québécoises, entre autres) qui seraient nécessaires à l'obtention du statut de résidence permanente octroyée par Ottawa.