Le gouvernement de François Legault doit renforcer les dispositifs de lutte contre la corruption et la collusion afin de restaurer la confiance de la population à l'égard de ses institutions, croit le comité de suivi public de la commission Charbonneau.

« Il s'agit d'une occasion unique de mettre l'intégrité au coeur de son mandat. Il faut la saisir », insiste le comité, qui rend public ce matin son troisième rapport depuis la fin des travaux de la commission Charbonneau.

Depuis 2015, « ce sont près de 70 % des recommandations qui sont appliquées partiellement ou complètement », constate le comité, formé des professeurs Luc Bégin, Denis Saint-Martin et Martine Valois, du président de la Ligue d'action civique Rodolphe Parent, du président de Transparency International Canada Paul Lalonde et d'un ancien recherchiste de la commission Charbonneau, Pierre-Olivier Brodeur.

Parmi les changements souhaités, le comité souligne que les firmes de services professionnels (génie, architecture, comptabilité, urbanisme, par exemple) devraient être assujetties au pouvoir d'encadrement des ordres professionnels. De tels pouvoirs sont nécessaires, soutient-on, pour lutter contre les stratagèmes de collusion et de corruption dans l'industrie de la construction.

Les travaux de la commission Charbonneau et, avant cela, des reportages journalistiques ont démontré que ce ne sont pas nécessairement les professionnels eux-mêmes qui orchestraient les dossiers litigieux, mais plutôt les têtes dirigeantes des firmes.

Ainsi, le comité invite la nouvelle ministre de la Justice, Sonia LeBel, ex-procureure en chef de la commission Charbonneau, à donner suite à cette recommandation.

Ce pouvoir d'encadrement existe dans les autres provinces canadiennes ainsi que dans plusieurs États américains. L'Office des professions ainsi que l'Ordre des ingénieurs du Québec se sont déjà prononcés en faveur d'un tel changement.

Selon les membres du comité, il reste aussi beaucoup à faire pour améliorer la confiance à l'égard des élus et des fonctionnaires. On rappelle ainsi qu'il faudrait obliger les ministres et les députés, de même que les membres de leur cabinet, à dévoiler l'intégralité de leurs activités professionnelles et, surtout, leur interdire de solliciter des contributions politiques auprès de fournisseurs et de bénéficiaires de soutien financier de leur ministère.

VULNÉRABILITÉ DU MONDE MUNICIPAL

Selon le comité, des gestes doivent être faits pour contrer la vulnérabilité du monde municipal. Comme le proposait le rapport final de la commission Charbonneau, le gouvernement doit ajouter les municipalités de moins de 100 000 habitants au champ de compétence du Vérificateur général du Québec, soutient le comité de suivi.

Au cours des derniers mois, le précédent gouvernement a voté un changement législatif qui confie aux vérificateurs privés ainsi qu'à la Commission municipale du Québec la vérification de la gestion municipale. Selon le comité de suivi, c'est trop peu.

Le comité propose aussi de mieux protéger les lanceurs d'alerte, comme le recommandait d'abord la Commission. Il vise principalement le monde municipal, dont l'accueil des lanceurs d'alerte est concentré au ministère des Affaires municipales. « Il serait plus judicieux que les lanceurs d'alerte qui s'adressent à une personne désignée dans une municipalité bénéficient de la protection de la loi comme c'est le cas dans les commissions scolaires ou les établissements de santé », souligne-t-on.

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70 % : Pourcentage des recommandations de la commission Charbonneau qui ont été appliquées partiellement ou complètement depuis 2015, selon le comité de suivi public