À quelques jours d'une campagne électorale qui s'annonce difficile, les députés libéraux ont été incapables de trancher une question délicate. Après des échanges émotifs, ils n'ont pas décidé si l'ex-ministre Pierre Paradis pourrait terminer sa carrière avec l'étiquette «libérale».

La question a surgi comme une surprise pour les députés réunis samedi en marge du congrès annuel des jeunes du PLQ, à Montréal. Philippe Couillard a fait valoir qu'il avait eu des demandes du député de Brome-Missisquoi qui souhaitait terminer sa carrière comme libéral - une reconnaissance officielle devrait être transmise à l'Assemblée nationale. Il est convenu qu'il ne sera pas de nouveau candidat, mais il tarde à l'annoncer - il devait le faire début juillet.

Cette reconnaissance dans ses notes biographiques aurait constitué un peu de baume sur la blessure de Pierre Paradis, mis au ban de son parti après une carrière de 37 ans comme député.

Selon les sources de La Presse, d'entrée de jeu, Philippe Couillard a paru favorable à cette idée. Mais, manifestement, il avait sous-estimé la réaction de son caucus.

Après une heure d'échanges stériles, il n'y a pas eu de décision, il s'est contenté de dire qu'«on s'en reparlera[it]» et les élus ont pu se rendre à l'activité de l'aile jeunesse.

Accusation d'inconduite sexuelle



Car sitôt l'idée lancée par M. Couillard, le débat s'est enflammé. Le ministre Pierre Moreau, surtout, a tout fait pour convaincre ses collègues qu'il s'agissait d'une décision bien risquée à la veille d'une campagne électorale. Surtout, un tel geste, inattendu, risquait d'être fort mal interprété par les électrices - les femmes sont généralement plus favorables aux libéraux qu'aux caquistes ou aux péquistes.

Le ministre de l'Énergie a été particulièrement virulent sur les conséquences d'une réhabilitation de l'ex-ministre Paradis, expulsé du caucus à la suite d'une plainte à la police de son ancienne chef de cabinet. Valérie Roy l'avait accusé d'inconduite sexuelle, mais le Directeur des poursuites criminelles et pénales n'avait déposé aucune poursuite contre l'ex-ministre de l'Agriculture. M. Paradis avait tout de même été expulsé du caucus libéral.

Depuis janvier 2017, M. Paradis, qui souffre d'une grave commotion cérébrale, n'est pas réapparu à l'Assemblée nationale.

Selon les informations colligées, les députés étaient carrément partagés sur l'opportunité d'obtempérer à cette demande. La ministre Hélène David a souligné qu'au-delà des individus, remettre cette question à l'ordre du jour risquait de soulever un débat inutile auprès de l'électorat féminin. D'autres ministres, dont Christine St-Pierre, toujours sensible à ces questions, étaient du même avis. Mais les opinions étaient partagées - rien à voir avec la réaction unanime, la répudiation spontanée des mêmes élus à l'endroit de Gerry Sklavounos, expulsé lui aussi du caucus libéral.

Dans des circonscriptions difficiles, les élus de la région de Québec étaient unanimement opposés à la réhabilitation du député. Les plus favorables étaient les élus de l'Estrie, la région de M. Paradis, indique-t-on.