Philippe Couillard ne trouve rien à redire des méthodes de son ministre de la Santé, Gaétan Barrette. Ce dernier n'est pas un homme brusque, mais plutôt « un homme décisif », soutient le premier ministre.

La Presse a publié, jeudi et vendredi, une enquête sur les méthodes musclées de M. Barrette au cours de son parcours professionnel, y compris comme ministre.

« Cautionnez-vous les méthodes brusques de votre ministre Gaétan Barrette ? » a-t-on demandé à M. Couillard vendredi, lors d'une conférence de presse où il dressait le bilan de la session parlementaire. Le premier ministre et ses députés présents ont spontanément éclaté de rire en entendant la question.

M. Couillard rejette le terme brusque. « J'utiliserais le mot décisif », a-t-il dit.

« C'est certainement un homme décisif, M. Barrette, je ne le nierai pas certainement. Mais je peux vous dire une chose, moi qui le côtoie tous les jours : c'est avant tout aux patients qu'il pense et pour lesquels il agit. Et ce que je lis ce matin, c'est essentiellement une question de pouvoir. (...) C'est des histoires de pouvoir : qui a le pouvoir, qui veut le pouvoir. »

Des acteurs du réseau ont dénoncé à La Presse le régime « totalitaire » instauré par Gaétan Barrette. Pour Philippe Couillard, son ministre est la cible de « lobbys » qui veulent « des bouts de pouvoir » et qui « ne parlent pas des patients ».

« Le réseau de la santé, même quand j'étais ministre, je comparais ça à une sorte d'océan polaire sur lequel flotte des dizaines de lobbys qui viennent s'entrechoquer constamment, chacun avec leur logique particulière, leur besoin qui doit devenir le besoin prioritaire du réseau du jour au lendemain. Le rôle du ministre de la Santé, c'est de faire un équilibre là-dedans. Et la seule façon de faire l'équilibre, c'est de regarder l'autre côté des icebergs, regarder les patients dans les yeux, et leur dire : écoutez, j'ai agi pour que vous soyez mieux traités, que vous ayez mieux accès aux soins. » C'est ce que M. Barrette a fait à ses yeux.

Ses méthodes ont donné des résultats selon lui : « J'ai à mes côtés un ministre qui a fait en sorte, avec son équipe, avec les gens du réseau, que près d'un million de personnes de plus ont accès à un médecin de famille, qui fait baisser le temps d'attente dans les urgences, pour les chirurgies ». C'est en étant « décisif » que M. Barrette est parvenu à ces résultats, selon M. Couillard.

Moins de deux heures plus tard, lors de la période des questions, le président de l'Assemblée nationale, Jacques Chagnon, a dû rappeler à l'ordre M. Barrette et lui demander de retirer des propos qu'il venait de tenir. Il avait accusé la CAQ « d'incompétence ». C'était quelques minutes après avoir reproché aux caquistes de « caqueter » en Chambre.

Au cours de sa conférence de presse, le premier ministre a tourné ses canons vers la CAQ. Ce parti, « c'est une blague », « du n'importe quoi », dirigé par un chef « arrogant » qui « navigue à vue », qui propose un « pseudo-changement », des idées d'un « ancien siècle » et qui tient l'appui de l'électorat pour acquis.

M. Couillard a décidé « de ne plus rien laisser passer » au sujet de la CAQ depuis la défaite cinglante dans Louis-Hébert, qui était un bastion libéral. « Ça m'a fait beaucoup de peine la partielle. Je ne blâme pas les électeurs. Je vais me blâmer moi-même, je dois prendre la responsabilité comme chef de parti. Vous savez, dans la vie, quand quelque chose commence mal, c'est rare que ça finit bien. On a eu toutes sortes de problèmes avec la candidature », a-t-il dit, faisant allusion à Éric Tétrault, qui a dû se retirer en pleine campagne parce qu'un rapport d'enquête a démontré qu'il avait fait du harcèlement psychologique au moment où il travaillait chez ArcelorMittal.

Il a fait valoir le bilan de son gouvernement, relevant entre autres le rehaussement de la cote de crédit du Québec, le faible taux de chômage, la création d'emplois.  Mais ce serait une « catastrophe annoncée » de se contenter de faire campagne l'an prochain seulement sur un bilan selon lui. « Ce n'est pas ça qu'on va faire pantoute, a-t-il lancé. Je ne dirai pas aux gens : donnez-moi quatre ans de plus comme premier ministre parce que ça va mieux au Québec.(...) Je ne veux pas être réélu juste sur mon bilan, mais sur la qualité de mon projet. » Il entend ainsi proposer un programme qui va « parler directement aux gens » et « améliorer leur quotidien, leur qualité de vie ».

Questionné sur les sondages qui relèvent une montée de la CAQ et une baisse marquée des appuis du PLQ dans la région de Québec, Philippe Couillard s'est dit prêt à mener la bataille. « Moi, je suis un combattant doux, je ne suis pas quelqu'un d'agressif. Mais je suis pas mal plus tough que le monde pense », a-t-il affirmé.