Le gouvernement n'attendra finalement pas les autres provinces pour interdire les clauses de disparité (clauses « orphelin ») dans les régimes de retraite, les assurances collectives et pour les autres avantages sociaux.

Dévoilé la semaine dernière, le rapport Fortin sur les clauses de disparité de traitement en fonction de la date d'embauche recommande de modifier la Loi sur les normes du travail pour les interdire. Mais il ajoute que cette interdiction ne devrait entrer en vigueur que le jour où toutes les autres provinces adopteront une loi semblable.

La ministre du Travail, Dominique Vien, avait d'abord laissé entendre que cette recommandation était justifiée, dans la mesure où une telle interdiction allait mettre en péril la compétitivité des entreprises québécoises, selon elle. Pour que le Québec aille de l'avant avec cette mesure, il devra être accompagné par « au moins une autre grande province canadienne », l'Ontario « idéalement », affirmait de son côté le premier ministre Philippe Couillard.

Cette position du gouvernement a soulevé la colère de syndicats, de Force jeunesse et même des jeunes libéraux. Elle a provoqué un débat au caucus des députés.

Philippe Couillard s'est finalement ravisé. Son entourage a confirmé que la réforme des normes du travail, qui était attendue ce mois-ci mais a été reportée en février ou en mars, interdira les clauses de disparité.

L'entrée en vigueur de cette mesure se fera aussitôt, sans attendre d'autres provinces, a-t-on précisé.

Dominique Vien est restée vague sur ce repositionnement hier. Le Québec « a toujours été un leader en matière de normes du travail. On va conserver ça », s'est-elle contentée de dire. Philippe Couillard est allé un peu plus loin en fin d'après-midi en disant qu'il ne veut pas être à la remorque des autres provinces en matière de normes du travail.

PÉNALISATION DES JEUNES TRAVAILLEURS

Quelques heures plus tôt, l'Assemblée nationale adoptait à l'unanimité une motion présentée par Québec solidaire et demandant au gouvernement « de déposer un projet de loi afin d'interdire les clauses de disparité de traitement fondées sur la date d'embauche des salariés, visant à une adoption d'ici juin 2018 ».

Les clauses de disparité pénalisent les jeunes travailleurs par rapport aux employés embauchés avant eux. Elles les privent de certains avantages consentis aux autres. Par exemple, dans certains régimes de retraite, il y a un volet à prestations déterminées pour les employés embauchés avant une date donnée et un autre à cotisations déterminées pour ceux qui ont été embauchés après cette date. Dans ce dernier cas, le risque est transféré de l'employeur aux participants.

Depuis 1999, les clauses de disparité sont interdites au Québec concernant le salaire, les congés, les vacances et les horaires de travail. Une telle mesure n'existe dans aucune autre province canadienne.

Le rapport Fortin a été réalisé par un groupe de travail dirigé par le député libéral André Fortin, avant qu'il ne soit nommé ministre des Transports. Ce groupe était formé de représentants du ministère des Finances, du Secrétariat du travail et de Retraite Québec.

Le rapport souligne qu'une interdiction des clauses de disparité pour les régimes de retraite et autres avantages n'aurait pas un effet rétroactif. Elle ne devrait pas exiger une correction à l'égard des années de service passées pour lesquelles des régimes ont présenté une disparité de traitement en fonction de la date d'embauche. «  L'enjeu est plutôt d'éviter que les disparités ne perdurent ou que de nouvelles ne soient mises en place  », indique le groupe de travail.