La décision de lancer une consultation sur la discrimination systémique et le racisme explique en partie que le Parti libéral a reçu «une belle claque sur la gueule» dans Louis-Hébert, selon deux élus libéraux de la région de Québec. D'autres considèrent que le gouvernement peine à faire passer son message auprès des électeurs.

Les électeurs de Louis-Hébert, dans l'ouest de la capitale, ont massivement élu la candidate de la Coalition avenir Québec, Geneviève Guilbault, lundi soir. Ils ont du coup tourné le dos aux libéraux, qui occupaient le siège depuis 2003. 

Pour le député de Vanier, Patrick Huot, cette défaite est notamment attribuable à la démission de Sam Hamad, ex-député de la circonscription, et aux «erreurs de début de campagne», avec le retrait du candidat libéral Éric Tétrault en raison d'une affaire de harcèlement psychologique.

Mais il y a plus, selon cet élu de Québec. «Les gens aimeraient ça qu'on écoute un peu plus certaines questions, entre autres la question sur la discrimination et le racisme. C'est des choses dont les gens nous parlent beaucoup. Les gens ont un certain malaise, comprennent peut-être mal où on s'en va», a-t-il soutenu.

Le député a poursuivi: «Il y a un problème au Québec, les immigrants ont un taux de chômage deux fois plus élevé. Il faut le régler. Comment aborder, comment discuter de la question? Ce sont des choses à voir. Peut-être qu'il faut mieux expliquer le processus. (...) Est-ce qu'on a la bonne solution? Est-ce qu'il faut adapter la solution?»

Son collègue dans Portneuf, Michel Matte, soutient que la consultation est «effectivement» mal reçue par les électeurs de sa circonscription. «Je ne pense pas que ce soit une priorité pour les comtés francophones», a-t-il lâché, laissant entendre par la suite que le gouvernement devrait abandonner l'exercice.

La ministre de l'Immigration, Kathleen Weil, considère qu'elle doit «redoubler d'effort» pour expliquer la «nécessité de faire une consultation». «C'est sûr qu'il y a certainement des régions, je pense la région de Québec, oui, en effet, il y a une sensibilité », a-t-elle reconnu. Elle a insisté: «ce n'est pas un tribunal, il n'y a pas de personne coupable, les Québécois ne sont pas racistes, il faut le répéter».

Pour Patrick Huot, le caucus libéral de la région de Québec ne ressent pas «des inquiétudes, mais on va dire l'expression: on a eu une belle claque sur la gueule. Il faut prendre un pas de recul et revoir notre message».

«Malgré qu'on a une économie forte, que tout va bien, la population ne comprend pas ce qu'on a mis de l'avant», a dit de son côté Michel Matte. Selon lui, «la population veut plus qu'un bon gouvernement, elle veut avoir des choses concrètes».

Le lieutenant de Philippe Couillard dans la région de Québec, François Blais, a reconnu que son gouvernement a reçu un message «fort» et «non-équivoque» de la population. Il y voit la preuve que ses troupes devront mieux communiquer d'ici aux élections générales, prévues le 1er octobre 2018. 

«Peut-être que là, en ce moment, il y a une difficulté au niveau de notre message à nous, a-t-il dit. La population cherche à nous comprendre, à nous suivre, ça va amener des clarifications et des réalignements de notre gouvernement.» 

Les médias en cause 

Député de Jean-Lesage, M. Drolet, a fait valoir que son gouvernement a réalisé plusieurs bons coups, comme le retour à l'équilibre budgétaire. Mais à ses yeux, ces réalisations n'ont pas été suffisamment relayées par les médias. 

«Jamais on ne parle de ces choses d'importance-là, a dit M. Drolet. De mon côté à moi, pour un député de terrain comme moi, il est évident qu'on a un message à écouter des citoyens. Et puis ce côté-là, quelque part, vous (les journalistes) avez un rôle à jouer pour nous donner une chance de faire paraître les coups qu'on fait du bon côté.»

M. Drolet a également convenu que son parti a pâti de la démission de Sam Hamad, qui a quitté la politique en avril un an après qu'il eut été éjecté du conseil des ministres. 

Le résultat de lundi soir a relancé les rumeurs d'un remaniement ministériel, maintes fois évoqué par M. Couillard au cours des derniers mois. 

M. Proulx, ministre de l'Éducation, a dit n'avoir aucune indication qu'un jeu de chaises musicales se trame au cabinet. En revanche, il estime que son gouvernement doit réagir au résultat de la partielle dans Louis-Hébert.

«C'est notre responsabilité à nous de recevoir ces messages-là, de les analyser et de poser des gestes en conséquence», a-t-il dit.

Le résultat de lundi soir est «un coup de tonnerre», selon le ministre et leader parlementaire, Jean-Marc Fournier. «Un coup de tonnerre, ça s'entend, ça s'analyse. Il me parait un peu tôt pour avoir toutes les réponses, mais on ne va pas la banaliser (l'élection). Si le coup de tonnerre est à ce point gros, il vaut la peine de l'analyser correctement», a-t-il dit.

Le whip Stéphane Billette considère que le gouvernement doit «acquiescer au message» lancé par les électeurs et «se retourner les manches».

De son côté, La ministre déléguée à la Réadaptation, Lucie Charlebois, perçoit que les électeurs veulent du gouvernement «davantage de démocratie».

«On a beaucoup de travail à faire», dit Lisée 

Le Parti québécois a encore «beaucoup de travail à faire» pour convaincre les électeurs de Louis-Hébert et de la région de Québec de les choisir comme alternative au gouvernement libéral, admet pour sa part le chef péquiste Jean-François Lisée. 

Réagissant mardi matin à la défaite de son candidat Normand Beauregard dans l'élection partielle de Louis-Hébert, hier, M. Lisée a indiqué que le message envoyé par les électeurs était tout de même une volonté de changement. 

«On voit que les Québécois, quand ils sont en campagne électorale et se posent la question, ils disent ''faut que les libéraux s'en aillent''. (...) On est dans cette phase du changement et la question est qui va bien représenter ce changement?», a analysé le chef péquiste. 

Dans Louis-Hébert, toutefois, les électeurs ont choisi la candidate caquiste Geneviève Guilbault, qui a obtenu plus de 50% des voix. Le candidat péquiste n'a fait que 16%, un «score» inférieur à ce que la formation souverainiste avait obtenu lors des dernières élections générales. 

«L'ensemble du ''commentariat'' a dit que c'est une lutte à deux entre la CAQ et le PLQ. Je comprends qu'un certain nombre d'électeurs [se soient dits] ''on ne prend pas la chance, notre objectif ce n'est pas d'élire la CAQ, c'est de débarquer le PLQ''», a ajouté M. Lisée.

- Avec Hugo Pilon-Larose et Denis Lessard