Philippe Couillard n'hésitera pas à aborder la délicate question du processus de paix israélo-palestinien avec Benyamin Nétanyahou. Le premier ministre a affirmé hier qu'il espérait aussi profiter de son tête-à-tête pour provoquer une « étincelle » qui convaincra son homologue de s'intéresser au Québec.

Les deux hommes doivent se rencontrer à Jérusalem, demain, au terme de la mission économique de M. Couillard en Israël. Le rendez-vous doit avoir lieu quelques heures à peine après le départ du président américain Donald Trump.

À l'avant-veille de la rencontre, M. Couillard a indiqué qu'il n'hésiterait pas à aborder le conflit israélo-palestinien.

« Je ne connais pas M. Nétanyahou, alors jusqu'à quel point il va vouloir engager une conversation avec moi, c'est sa décision, a-t-il dit. Mais je vais être très intéressé, je vais lui demander comment il voit l'avenir du processus de paix. »

Le premier ministre reconnaît qu'il s'agit d'une question délicate. Mais il souligne que « tout interlocuteur ici veut entendre parler de cette question ».

« Il y a un grand appétit pour la paix de part et d'autre, et j'espère que ce sera suffisant pour faire le prochain pas », a dit M. Couillard.

UNE « ÉTINCELLE »

La rencontre sera par ailleurs une rare occasion d'intéresser un leader mondial au Québec, une province qui présente plusieurs similitudes avec Israël, a fait valoir le premier ministre. Les deux ont des populations comparables, une culture distincte et des produits intérieurs bruts semblables.

« On me dit que c'est un homme très direct, alors je vais lui parler très directement du Québec », a dit M. Couillard en marge d'un dîner avec des gens d'affaires israéliens et québécois.

Le premier ministre souhaite augmenter la valeur des échanges entre Israël et la province. Pour ce faire, il mise sur les industries de pointe comme l'intelligence artificielle. Une part importante de sa visite est d'ailleurs consacrée aux entreprises de ce secteur.

Il espère provoquer « une étincelle d'intérêt accru » pour le Québec de la part de M. Nétanyahou.

« S'il a un degré d'intérêt envers le Québec, ça fait partie des choses qui, après la visite, vont permettre d'avoir des suivis encore plus efficaces. »

UN SUCCÈS DIPLOMATIQUE

L'obtention d'une rencontre avec le premier ministre israélien constitue un succès diplomatique important pour le Québec, estime Philippe Couillard. Il y voit une preuve que la province peut s'engager sur la scène internationale tout en restant à l'intérieur du Canada. « Ça démontre pour nous, encore une fois, s'il fallait le démontrer encore une fois, qu'il est possible de combiner un sentiment national très fort pour le Québec avec la citoyenneté canadienne et l'appartenance à la fédération canadienne. »

***

Où est le drapeau ?

Le premier ministre s'est rendu à l'Université de Tel-Aviv, en matinée. Il a pris part à une cérémonie pour souligner la construction prochaine du pavillon de l'École d'architecture David Azrieli, architecte et philanthrope israélo-canadien, mort en 2014. Au terme de son discours, un employé a posé un drapeau canadien à côté de ceux d'Israël et de l'Université de Tel-Aviv. Ce faisant, il a involontairement forcé le premier ministre à se prononcer sur l'absence d'un drapeau québécois. « C'était rigolo parce que c'était un événement privé, a observé M. Couillard. Je vois ce monsieur arriver, je ne sais pas pourquoi il se sentait obligé de faire ça, mais ce n'est pas particulièrement significatif. »

***

Lutte contre le terrorisme: quand l'Union européenne s'inspire d'Israël

Si les Européens sont à la traîne d'Israël en matière de lutte contre le terrorisme, c'est parce qu'ils composent avec un afflux d'immigrants clandestins et qu'ils doivent ménager la sensibilité de leur communauté musulmane, estime une experte israélienne. « En Europe, ils sont plus polis, si j'ose dire, résume Amira Halperin, professeure à l'Institut Truman de l'Université hébraïque de Jérusalem.

« Ils souhaitent protéger leurs citoyens d'un côté, mais de l'autre, ils souhaitent également ménager les sensibilités de la communauté musulmane. Ils ne veulent pas blesser les gens de ces communautés. »

Israël a été impliqué dans de nombreuses guerres avec ses voisins arabes, et les soulèvements palestiniens l'ont amené à acquérir une expertise de pointe en matière de sécurité. « Lorsque la première Intifada a éclaté, il y a eu une escalade, relate Mme Halperin. Les gens ont compris en Israël qu'il fallait faire quelque chose. »

Le pays travaille aujourd'hui avec les pays de l'Union européenne pour améliorer leur dispositif sécuritaire, mais le retard persiste. Plusieurs mesures israéliennes, notamment en matière de profilage et de prévention en amont, n'ont pas encore été implantées.

PHOTO TIRÉE DU COMPTE TWITTER DE PHILIPPE COUILLARD

Philippe Couillard a participé hier à une cérémonie pour souligner la construction prochaine du pavillon de l'École d'architecture David Azrieli à l'Université de Tel-Aviv.