Le chef du Parti québécois (PQ), Jean-François Lisée, a contredit jeudi son leader parlementaire, qui avait affirmé être incapable d'imaginer son parti accéder au pouvoir en 2018 sans l'aide de Québec solidaire (QS).

«Si on s'unit, on a des chances de gagner. Si Québec solidaire, comme nous, a envie de remplacer le gouvernement libéral (...) on ne pourra pas le faire seul, a dit Pascal Bérubé lors d'un point de presse matinal à l'Assemblée nationale. Je ne crois pas que Québec solidaire puisse le faire seul et je ne crois pas qu'on puisse le faire seul pour l'instant.»

Cette imploration a été formulée à la veille du congrès de Québec solidaire, qui abordera notamment la question d'une alliance électorale entre les deux partis pour déloger les libéraux.

«C'est difficile, c'est difficile parce que je vous l'ai dit, il y a un seuil incompressible de sièges avec le Parti libéral. À 8 h 10, le soir d'une élection, il a déjà 40 sièges en avance et à 8 h 20, il en a à peu près 50, et ça continue», a poursuivi M. Bérubé.

Lors de ce même point de presse, M. Bérubé a dit s'en remettre aux 15 000 membres de QS. Rien ne va plus, les jeux sont faits, à QS de décider, a-t-il lancé aux journalistes présents.

Manque d'optimisme

M. Lisée a rapidement remis les choses au clair: le PQ entend former un gouvernement majoritaire en 2018. Il a dit comprendre que M. Bérubé est «moins optimiste» que lui.

«On en a discuté tout à l'heure ensemble, puis il a dit: «Oui, effectivement, je pense que je suis allé un peu fort là-dessus, et nous avons la capacité de gagner une majorité'.»

Selon M. Lisée, le PQ est «très bien positionné» pour remporter le prochain scrutin. «Face à nous, il y a deux gouvernements fédéralistes de droite qui vont proposer des baisses d'impôt, et ça, ça signifie de l'austérité. (...) Nous, on est certains que, dans cette discussion-là, on va gagner, et on va gagner majoritaire», a-t-il dit.

Alors, pourquoi faire la cour à Québec solidaire? «Nous sommes des rassembleurs, et nous pensons que c'est encore mieux, pour gagner encore plus fort, que les progressistes et les indépendantistes additionnent leurs voix», a répondu M. Lisée.

QS se réunit en congrès

La question de la convergence des forces souverainistes atterrira au congrès de Québec solidaire ce week-end, à Montréal.

Sans adhérer à la vision de M. Lisée, QS avait dit en novembre être prêt à explorer des candidatures communes aux élections contre les libéraux à certaines conditions.

Ces candidatures communes ne seraient pas possibles sans un programme «résolument progressiste» du PQ, Québec solidaire évoquant comme conditions d'alliance la fin de l'austérité et un réinvestissement dans les services publics, le féminisme comme valeur partagée, la fin de l'exploration des hydrocarbures en sol québécois, un mode de scrutin proportionnel, un projet indépendantiste inclusif et la reconnaissance du droit à l'autodétermination des nations autochtones et inuit.

Encore jeudi, la députée solidaire Manon Massé trouvait le PQ trop à droite sur l'échiquier politique.

«Nous à Québec solidaire, on ne veut pas d'une pâle copie de cette droite qui amène le Québec dans le mur décennie après décennie», a-t-elle dit.

«Lorsqu'on regarde les budgets d'austérité proposés par (l'ancien ministre péquiste des Finances) Nicolas Marceau, lorsqu'on regarde les décisions qui ont été prises par le passé au niveau de l'aide sociale, (...) au niveau des hydrocarbures, la direction du PQ ne m'apparaît pas une direction qui va dans le sens de la nécessaire transition qu'on doit faire actuellement», a-t-elle maintenu.

Le député solidaire Amir Khadir a récemment évoqué un scénario d'échange possible de 30 circonscriptions entre le PQ et QS.

QS s'abstiendrait de présenter un candidat dans 21 circonscriptions, en échange de quoi le PQ lui laisserait le champ libre dans neuf circonscriptions montréalaises.

Le PQ est «perdu»

La discussion sur la convergence qui échauffe actuellement les esprits a fait dire à la Coalition avenir Québec (CAQ) que le PQ est «perdu».

«La stratégie du Parti québécois, on en a rien à cirer, a déclaré le leader parlementaire de la CAQ, François Bonnardel. Les militants comprennent aujourd'hui qu'il y a un chef politique, Jean-François Lisée, qui est perdu dans sa stratégie pour être capable d'aller chercher plus de militants et de votes.»

La CAQ a fait bonne figure cette semaine dans un sondage Mainstreet/Postmedia, qui plaçait la formation au coude-à-coude avec les libéraux de Philippe Couillard.

À moins d'un an et demi du prochain scrutin, le président du Conseil du trésor, Pierre Moreau, a affirmé que les Québécois réfléchissaient surtout à quel parti pourrait mettre plus d'argent dans leurs poches.

«On ne fait pas son succès politique sur le désespoir des autres, a-t-il dit, sourire en coin. Les programmes du gouvernement fonctionnent bien, les résultats économiques sont là et je suis convaincu qu'à long terme, c'est là que les Québécois vont fixer leur oeil avant de dessiner leur croix.»

Le ministre a par ailleurs rejeté l'idée qu'il fallait à tout prix faire rêver l'électorat.

«Le problème avec un rêve, c'est qu'un jour on se réveille. (...) Quand on se réveille, on a un contact avec la réalité et on doit vivre tous les jours avec la réalité. Un rêve dure le temps d'une nuit», a-t-il imagé.

Jacques Boissinot, archives PC

Le leader parlementaire du PQ, Pascal Bérubé.