Qualifiant le phénomène des sextos entre adolescents de «très préoccupant» en raison des «conséquences désastreuses» que ceux-ci entraînent dans leur vie, le gouvernement de Philippe Couillard estime qu'il faut s'y attaquer en sensibilisant les jeunes au caractère public et permanent de ce qu'ils publient sur les réseaux sociaux.

«Quand on parle aux directeurs d'école, on se rend compte que c'est LE problème auquel ils font face actuellement», a dit la ministre Rita de Santis en entrevue à La Presse en réaction à notre série de reportages sur le sextage chez les jeunes publiée la semaine dernière.

La Presse a révélé que le phénomène baptisé «autoexploitation juvénile» par les experts fait de plus en plus de ravages. À Montréal, une adolescente de 13 ans a fait une tentative de suicide le mois dernier après que son ex-ami de coeur a menacé de diffuser à toute l'école une photo osée d'elle qu'elle lui avait transmise alors qu'ils étaient encore en couple.

Autre cas récent : une dizaine de joueurs de football d'une polyvalente de l'est du Québec ont été accusés au criminel après avoir échangé des photos intimes d'une quinzaine de victimes mineures comme des «cartes de hockey».

«Ce que tu publies, penses-y»

À la fin de l'automne dernier, le gouvernement Couillard a lancé une tournée de sensibilisation à la protection des renseignements personnels et de la vie privée sur l'internet pour les jeunes du deuxième cycle du secondaire (14 à 17 ans), souligne la ministre de Santis, responsable de l'Accès à l'information et de la Réforme des institutions démocratiques, qui assiste aux conférences lorsque son horaire le permet.

Dans le cadre de cette tournée, baptisée «Ce que tu publies, penses-y», toutes les directions d'école ont sonné l'alarme, indique la ministre, dont le mandat comprend la protection des renseignements personnels.

«Les directions d'école sont aux prises avec un problème qui déborde les heures de classe. Des parents ne savent pas comment y faire face. Des étudiants sont intimidés. D'autres sont gênés ou ont honte. Des étudiants sont très vulnérables et ont même parfois des idées suicidaires, poursuit la ministre de Santis. Si j'étais une jeune fille et que ma photo osée circulait partout, je ne sais pas comment je réagirais. J'aurais sans doute moi-même des idées suicidaires.»

Le gouvernement Couillard a confié l'animation de la tournée à la vedette de Vrak.tv Nicolas Ouellet. Cette idole des jeunes aborde la question de la vie privée, mais surtout les conséquences reliées à la perte de celle-ci, comme le vol d'identité, l'atteinte à la réputation et la perte de la liberté de choix (entre autres par l'effet de «bulle» créé par les algorithmes).

«Les jeunes sont très attentifs lorsque Nicolas leur parle des conséquences de ce qu'ils font sur internet, observe Mme de Santis. À la fin de la conférence, ils viennent lui demander comment désactiver telle ou telle application.»

Le gouvernement peut mettre en place toutes sortes de lois, mais c'est aux jeunes eux-mêmes de se protéger en étant responsables de leurs actions sur le web, selon Mme de Santis. «On veut qu'ils comprennent que tout ce qui est publié [sur le web] reste pour toujours», conclut la ministre du gouvernement Couillard.