Le ministre de la Sécurité publique, Martin Coiteux, a affirmé mardi qu'il est «souhaitable» que les enquêtes internes en cours au Service de police de la Ville de Montréal (SPVM) soient transférées à l'équipe d'enquêteurs qu'il a mise sur pied la semaine dernière.

En matinée, le directeur du SPVM, Philippe Pichet, a annoncé que la totalité des enquêtes internes et spéciales en cours et futures seront transférées à l'équipe de la Sûreté du Québec (SQ) chargée de faire la lumière sur les allégations qui secouent le corps policier municipal.

«Puisque les enquêtes internes du SPVM pourraient être visées par certaines allégations, donc des enquêtes de nature potentiellement criminelles, (...) je pense que c'est plus que normal, c'est même tout à fait souhaitable, que ce soit envoyé à l'équipe élargie», a affirmé le ministre Coiteux.

Le ministre a rejeté le terme «tutelle» pour qualifier la situation. Il a assuré qu'il n'est pas question pour la SQ commence d'enquêter sur tous les cas de discipline interne au SPVM.

«Ça ne veut pas dire qu'elle va s'occuper de tous les cas d'inconduite à l'intérieur du SPVM, a précisé M. Coiteux. Ce n'est pas l'employeur du SPVM. Mais s'il y a des allégations de nature criminelle, c'est tout à fait logique dans les circonstances que ce soit cette équipe qu'on a montée vendredi qui s'en occupe.»

Il a par ailleurs défendu la conduite de son ministère, qui a été informé il y a trois ans d'allégations de pratiques douteuses au SPVM par les ex-policiers Giovanni Di Feo et Jimmy Cacchione. La Presse a révélé mardi que les deux hommes, qui ont allégué certains faits troublants concernant le corps de police à l'émission J.E. la semaine dernière, avaient fait part de leurs allégations au ministère de la Sécurité publique dans une lettre en février 2014.

«Ils ont fait exactement ce qu'il y avait à faire à cette époque, c'est-à-dire d'entrer en contact directement avec le SPVM», a dit le ministre.

L'opposition veut le BEI

Mais pour la Coalition avenir Québec, le fait que les allégations de MM Di Feo et Cacchione soient restées lettre morte prouve qu'il faut évincer la SQ de l'enquête. Le député André Spénard fait valoir que le sous-ministre qui avait reçu la lettre à l'époque, Martin Prud'homme, est aujourd'hui à la tête de la police proviniciale.

«Ça disqualifie encore davantage la SQ: ils n'ont absolument rien fait. Ils attendent que ça sorte dans les journaux au lieu de prendre en cause les dénonciations de Di Feo et de Cacchione.»

Le Parti québécois juge que les enquêtes internes du SPVM devraient être revues par le Bureau des enquêtes indépendantes, et non par la SQ.

«La police qui enquête sur la police, ce n'est pas une bonne idée», a résumé le député péquiste Pascal Bérubé. 

M. Pichet a demandé à la SQ de «revoir» certaines pratiques de son service, la semaine dernière. La décision est survenue après un reportage de TVA dans lequel deux anciens officiers, Jimmy Cacchione et Giovanni Di Feo, ont accusé la Division des affaires internes du SPVM d'avoir fabriqué des éléments de preuve contre eux.

Informé de nouvelles allégations de nature criminelle, le ministre Coiteux a élargi l'enquête vendredi. La directrice du Bureau des enquêtes indépendantes (BEI), Madeleine Giauque, a été ajoutée à l'équipe d'enquête, de même qu'un procureur du Directeur des poursuites criminelles et pénales (DPCP). Des policiers de différents corps municipaux et le la Gendarmerie royale du Canada se sont aussi greffés à l'unité.

Québec a également institué une enquête administrative sur les pratiques du SPVM.