Le gouvernement Couillard s'apprête à moins bien protéger les aînés que les animaux contre la maltraitance, accuse le Conseil pour la protection des malades.

Les consultations en commission parlementaire débutent aujourd'hui sur le projet de loi 115 visant à lutter contre la maltraitance envers les personnes âgées. Québec veut faciliter la dénonciation des abus, en vertu de cette pièce législative déposée l'automne dernier.

Le Parti libéral s'était engagé en campagne électorale à imposer « des amendes pour toutes personnes qui entraveraient la lutte contre la maltraitance », ce qu'on ne retrouve pas dans le projet de loi 115. L'imposition de sanctions pénales était pourtant prévue dans un autre projet de loi sur la maltraitance, mort au feuilleton et présenté par le PLQ il y a trois ans, quand il était dans l'opposition.

Le projet de loi 115 va donc moins loin que la Loi sur la protection du bien-être et de la sécurité des animaux, adoptée par le gouvernement Couillard en 2015, selon le Conseil pour la protection des malades.

« Le gouvernement libéral en 2015 a adopté une loi très sévère : si vous êtes maltraitant envers les animaux, vous pouvez payer une amende jusqu'à 65 000 $. Jamais je ne croirai qu'on n'adoptera pas de sanctions pénales pour ceux qui maltraiteront nos personnes âgées ! » a lancé son président, Paul Brunet, avant le début des consultations, mardi.

Il était aux côtés du député caquiste François Paradis, qui demande lui aussi au gouvernement d'adopter une loi « plus musclée ».

M. Paradis a déploré que le gouvernement ne va pas jusqu'à obliger tout employé du réseau de la santé et des services sociaux à dénoncer des situations d'abus. Cette mesure était pourtant comprise dans le précédent projet de loi libéral. C'est un « recul » aussi inacceptable qu'incompréhensible aux yeux de l'élu caquiste.

L'ajout d'une clause de « dénonciation obligatoire » a également été réclamé par Donald Tremblay, président de l'Association québécois des retraités des secteurs public et parapublic.

Le gouvernement doit ajouter la « maltraitance institutionnelle » parmi les abus contre les aînés, a soutenu Judith Gagnon, de l'Association québécoise de la défense des droits des personnes retraitées et préretraitées. « Quand les gens ne reçoivent pas leurs services et croupissent des fois dans des conditions difficiles, est-ce que ce n'est pas une forme de maltraitance ? » a-t-elle dit à l'occasion de la conférence de presse convoquée par M. Paradis.  

Lors du dépôt du projet de loi en octobre, des représentants du Regroupement provincial des comités des usagers étaient aux côtés des ministres Francine Charbonneau (Aînés) et Gaétan Barrette (Santé et Services sociaux) pour appuyer le projet de loi 115. Mais après analyse, son directeur Pierre Blain a affirmé que son appui est maintenant « tiède ». 

En vertu des conventions collectives, « un employé maltraitant voit son acte répréhensible disparaître de son dossier après une année à peine, comme si rien n'avait eu lieu ». « L'article 76.8 de la Loi sur les services de santé et les services sociaux empêche d'inscrire une plainte des usagers au dossier de l'employé », a-t-il ajouté lors d'un entretien avec La Presse. 

Le projet de loi « ne remplit pas ses promesses » selon lui.  Il vise principalement le secteur de la santé et des services sociaux, alors que « la majorité des cas de maltraitance ont lieu ailleurs, à domicile très souvent ». « On ignore une très grande proportion des victimes », a-t-il soutenu.

- Avec la collaboration de Martin Croteau

Photo André Pichette, archives La Presse

Paul Brunet, président du Conseil pour la protection des malades.