La jeune femme qui dit avoir été agressée sexuellement par un député libéral affirme qu'elle a dénoncé le geste publiquement pour inciter d'autres victimes à porter plainte contre leurs agresseurs.

Alice Paquet a révélé son expérience pour la première fois, mercredi soir, lors d'une vigie pour soutenir les victimes de la vague d'agressions sexuelles survenue à l'Université Laval. Un témoignage qui a amené le député Gerry Sklavounos à se retirer du caucus libéral 24 heures plus tard.

Lors d'une courte entrevue avec La Presse, jeudi, la jeune femme a dit espérer que d'autres lui emboîtent le pas.

« Avec toute la vague de dénonciations qui a eu lieu, je me suis dit que c'était impératif qu'on ne garde pas ces choses-là pour nous », a-t-elle dit.

« Ce n'était pas pour me libérer d'un poids parce que moi, mon cheminement personnel, je l'ai fait de mon côté, a-t-elle précisé. J'ai consulté et tout ça, c'était pour inciter d'autres femmes qui ont vécu des agressions sexuelles à dénoncer. »

La jeune femme a retenu les services de l'avocat Julius Grey afin de l'épauler pour la suite des choses. Celui-ci a préféré ne pas commenter le dossier, jeudi, puisqu'il n'avait pas pu parler à sa cliente.

AGRESSÉE DANS UN RESTAURANT

Mme Paquet a confirmé avoir eu un rapport sexuel violent avec un élu de l'équipe gouvernementale. Elle a refusé d'identifier son agresseur.

Dans un message publié sur sa page Facebook, elle a précisé que le geste a été commis à l'été 2014 sur son « lieu de travail », un restaurant de Québec où elle était hôtesse. Le député était un client régulier de l'établissement.

Elle a changé d'emploi « quelques semaines » après le geste, a-t-elle confirmé jeudi.

« C'est triste parce que cet homme, en plus de m'avoir fait perdre mon travail, parce que c'est un "vieil ami du patron", m'a fait perdre ma sexualité, l'estime que j'avais de moi-même, a-t-elle écrit. Il m'a non seulement blessée physiquement, mais psychologiquement, et ce, pour la vie. »

Dans son témoignage de mercredi soir, Mme Paquet a relaté avoir tenté de dénoncer le geste du député.

« Ce n'est pas parce que je ne l'ai pas dénoncé, a-t-elle déclaré. C'est juste qu'on a voulu protéger l'agresseur parce qu'il a un siège à l'Assemblée nationale, parce que c'est un homme important, parce que sa carrière est plus importante que l'agression que j'ai vécue. »

Au bout du fil, elle explique que ce ne sont pas des policiers ou des membres du gouvernement qui ont tenté de la dissuader de témoigner. Ce sont plutôt des membres de son entourage et des collègues de travail.

Alice Paquet a révélé s'être rendue dans une chambre, située à l'étage du restaurant où elle travaillait, en compagnie de Gerry Sklavounos, dans une entrevue accordée jeudi soir à l'émission 24/60 de RDI.

Consentante au départ, la jeune femme a déclaré ne pas se souvenir si elle avait exprimé clairement un « non » au moment de la relation sexuelle. Elle a précisé qu'embrasser quelqu'un à ses yeux n'était pas un « contrat ».

« Il m'invite à sa chambre, j'y vais. Jusqu'à un certain moment, j'étais consentante, a-t-elle confié à l'émission 24/60 de RDI. Mais un baiser, ce n'est pas un contrat. Une caresse, ce n'est pas un contrat. Ce n'est pas parce qu'on s'enlace que nécessairement ça doit mener à une relation sexuelle. »

La présumée victime aurait rencontré M. Sklavounos à une deuxième reprise, où elle aurait à nouveau été « violentée ». Elle ne peut expliquer les raisons qui l'ont poussée à accepter ce rendez-vous.

ENQUÊTE

Le Service de police de la Ville de Québec a confirmé jeudi avoir ouvert une enquête sur les allégations en mars dernier. Son porte-parole, David Poitras, a précisé que les enquêteurs ont besoin « de la collaboration de la victime pour continuer ».

Alice Paquet a semblé confirmer qu'elle a coupé les ponts avec les enquêteurs. Elle dit avoir été prise d'anxiété après ses premiers contacts avec eux.

« Quand j'ai fait ma plainte, l'enquêteur m'a rejointe, a-t-elle relaté. J'ai commencé à faire de l'anxiété avec tout ce qu'on me disait autour de moi que je pouvais gâcher sa vie, qu'il a une femme. Avec tout ce qui s'est passé, j'étais trop anxieuse. J'étudiais à ce moment-là, ça nuisait à mes études. Alors, j'ai comme laissé ça de côté. »